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Projet de recommandation au Parlement européen concernant la plainte 902/2007/(MHZ)RT

(Conformément à l’article 3, paragraphe 6, du Statut du Médiateur européen(1))

LA PLAINTE

Selon le plaignant, un fonctionnaire du Parlement européen, les faits se sont en résumé présentés comme suit :

Tout juste 15 jours avant l’entrée en vigueur du nouveau Statut, la catégorie du plaignant est passée d’agent temporaire de grade C à fonctionnaire de grade D.

Le 14 juin 2004, suite au premier paiement fait au plaignant conformément à sa nouvelle catégorie et à son nouveau grade, il a demandé par courrier électronique à l’administration si le nouveau montant de son salaire était correct.

Dans sa réponse datée du même jour, un fonctionnaire de la Division des décomptes du Parlement a affirmé que le montant de 3 108,01 EUR qui a été versé par le Parlement sur le compte en banque du plaignant était en effet son salaire net mensuel pour le mois de juin et correspondait à sa nouvelle catégorie en tant que fonctionnaire. Le fonctionnaire du Parlement a ajouté que le changement de catégorie du plaignant, en date du 16 avril 2004, le faisant passer d’agent temporaire à fonctionnaire, se reflétait dans le paiement de son salaire pour le mois de mai 2004. D’après le courrier électronique du fonctionnaire au plaignant : «Le montant de EUR 3.108,01 que vous avez reçu sur votre compte est bien le salaire net mensuel pour juin (comme fonctionnaire). Le changement de régime temporaire/fonctionnaire à partir du 16 avril a été fait dans la paie de mois de mai.»

Au vu de cette réponse et du fait que les tâches du plaignant dans sa nouvelle catégorie étaient les mêmes que celles qu’il accomplissait dans l’ancienne, et d’après les «Dispositions générales d'exécution relatives au classement en échelon» émises par le secrétaire général du Parlement le 18 mai 2004, le plaignant a pensé que, en ce qui concernait le salaire, son changement de catégorie lui était favorable sous le nouveau Statut. Deux ans plus tard, l’administration du Parlement a remarqué que le salaire du plaignant avait été calculé erronément (en ce qui concerne son indemnité de secrétariat et son salaire net) et qu’il avait été surpayé durant la période intermédiaire.

Le 26 juin 2006, l’administration a pris une décision au sujet du plaignant, selon laquelle, sur la base de l’article 85 du Statut, il lui était demandé de rembourser les sommes d’argent qui lui avaient été payées en surplus en tant qu’indemnité de secrétariat. La somme à rembourser s’élevait à 3 052,15 EUR. L’administration a reconnu que le paiement excessif des indemnités de secrétariat au plaignant résultait d’une erreur administrative, mais continuait en déclarant que le paiement en question était tellement évident dans les bulletins de salaire mensuels du plaignant qu’il ne pouvait pas l’avoir ignoré. L’administration a dès lors décidé que le paiement excessif serait récupéré dans le salaire mensuel du plaignant à partir d’avril 2006 au moyen de sept versements mensuels de 415 EUR chacun, ainsi qu’un versement final de 147,15 EUR.

Au sujet du paiement excessif du salaire net du plaignant, l’administration a expliqué dans sa décision du 26 juin 2006 que l’erreur était due au changement de catégorie du plaignant qui, pour des raisons techniques, ne s’est pas reflété dans le nouveau logiciel comptable du nom de «PAIE». Dès lors, l’administration estime que le plaignant ne pouvait pas raisonnablement avoir eu conscience de l’erreur administrative et que donc l’article 85 du Statut ne s’appliquerait pas aux paiements excessifs faits au plaignant.

Le plaignant n’a pas approuvé cette décision et, le 4 septembre 2006, il a fait appel au titre de l’article 90, paragraphe 2 du Statut. Le plaignant a souligné que (i) l’erreur a été faite par l’administration ; (ii) il a lui-même attiré l’attention de l’administration sur le montant de son salaire par son courrier électronique du 14 juin 2004 et il a fait remarquer que le montant total de son salaire en tant que fonctionnaire semblait être égal au montant de son salaire en tant qu’agent temporaire ; (iii) dans sa réponse, l’administration lui a assuré que les calculs étaient corrects en ce qui concernait son salaire net mensuel ; et (iv) étant donné que les composantes de son salaire en tant qu’agent temporaire et en tant que fonctionnaire étaient identiques, le plaignant n’aurait pas pu être conscient que les calculs de certaines composantes de son salaire étaient erronées et d’autres non. Le plaignant a déclaré qu’il était de bonne foi et a souligné que le recouvrement, tel qu’annoncé dans la décision de l’administration du 26 juin 2006, avait eu des effets nocifs sur sa situation financière familiale, étant donné que son fils handicapé adulte dépendait en permanence du soutien parental. Le plaignant a demandé au Parlement d’annuler la décision du 26 juin 2006.

Le 14 février 2006, le secrétaire général du Parlement a répondu à l’appel du plaignant. Il a maintenu la décision de l’administration du 26 avril 2006. Il a souligné que, selon la jurisprudence établie du juge communautaire, l’application de l’article 85 du Statut présupposait que l’administration avait commis une erreur dans les paiements (Affaire T-122/96 Chabert / Commission(2)). Dans le même jugement, le tribunal a déclaré qu’il n’était pas nécessaire de déterminer si l’erreur était évidente pour l’administration, mais plutôt si l’erreur était évidente pour le fonctionnaire concerné. Le secrétaire général a estimé que, pour des raisons techniques, le plaignant n’était pas en mesure de déterminer s’il y avait eu une erreur dans le calcul de son salaire de base. En ce qui concerne les indemnités de secrétariat, le plaignant était répertorié comme fonctionnaire de catégorie D le 16 avril 2004, c’est-à-dire avant l’entrée en vigueur du nouveau Statut, et, étant donné son ancienneté dans l’institution, il savait que selon l’ancien Statut (article 4 bis, annexe VIII), seuls les fonctionnaires de catégorie C pouvaient recevoir des indemnités de secrétariat. Dès lors, le plaignant ne pouvait conclure à la lumière du nouveau Statut que des indemnités de secrétariat devaient également lui être payées en tant que fonctionnaire de catégorie D. Concernant le courrier électronique du plaignant daté du 14 juin 2004, le secrétaire général a déclaré que «il ne ressort pas de votre dossier que vous ayez fait part de doutes sérieux et précis quant au bien-fondé du versement de l'indemnité de secrétariat elle-même.» Au sujet de l’indemnité de secrétariat, le secrétaire général a précisé que «vous avez contacté l’unité des Décomptes à une seule reprise»(3). Il est dès lors satisfait aux conditions d’application de l’article 85. En outre, le secrétaire général est d’avis que le recouvrement du montant dû en sept mois correspond aux principes de bonne administration et de diligence. Enfin, le secrétaire général informe le plaignant des moyens de recours à sa disposition : le juge communautaire et le Médiateur.

Le 28 mars 2007, le plaignant a introduit une plainte auprès du Médiateur.

Le plaignant avance que le Parlement applique dans son cas l’article 85 du Statut à tort et qu’il ne prend pas sa bonne foi en compte.

Le plaignant allègue qu’étant donné sa situation familiale, il serait injuste que le Parlement recouvre les paiements excessifs.

Le plaignant prétend que le Parlement devrait annuler sa décision de récupérer le montant de 3 052,15 EUR.

L’ENQUÊTE

L’avis du Parlement

En réponse à la demande du Médiateur faite dans sa lettre d’ouverture d’enquête, le Parlement a joint à son avis une copie des bulletins de salaire du plaignant pour les mois d’avril, mai et juin 2004 ainsi qu’une copie des «Dispositions générales d’exécution relatives au classement en échelon», publiées par le secrétaire général du Parlement le 18 mai 2004.

L’avis peut être résumé comme suit :

Le plaignant a occupé un poste d’agent temporaire de catégorie C entre octobre 2001 et le 15 avril 2004.

Le 16 avril 2004, il est nommé fonctionnaire à l’essai de catégorie D, grade D3/3 au titre de l’ancien Statut.

Deux erreurs ont alors été faites dans le calcul de sa rémunération. Premièrement, son droit à l’indemnité de secrétariat n’a pas été révoqué. Deuxièmement, une erreur informatique a été faite dans le dossier du plaignant suite à l’introduction du nouveau logiciel «PAIE». Suite à ces erreurs, le plaignant a continué de recevoir le même salaire de base, ainsi que les indemnités de secrétariat bien que sa catégorie ait changé.

Lorsque l’autorité investie du pouvoir de nomination a été mise au courant de la situation, elle a décidé, au titre de l’article 85 du Statut, de ne pas récupérer le montant excessif de 4 746,58 EUR payé pour son salaire de base, qui fut le résultat d’une erreur informatique, ce dont le plaignant n’aurait pas pu être conscient. Elle a toutefois décidé de récupérer l’indemnité de secrétariat, c’est-à-dire la somme de 3 052,15 EUR.

Le Parlement estime que les deux erreurs faites par l’administration dans le calcul du salaire du plaignant lorsqu’il a cessé d’être agent temporaire de grade C5/4 pour devenir un fonctionnaire de grade D3/36 n’ont pas été contestées.

Le Parlement rappelle que, pour appliquer l’article 85 du Statut, l’administration doit soit prouver que le fonctionnaire concerné était conscient que les paiements n’étaient pas dus, soit que le paiement excessif était tellement évident que le fonctionnaire concerné ne pouvait pas ne pas en être conscient.

Concernant la dernière condition de l’article 85 du Statut, le Parlement a souligné que, selon la jurisprudence établie par le juge communautaire, il n’était pas question ici d’établir si l’erreur était claire pour l’administration, mais si elle était claire pour le fonctionnaire concerné(4). Selon le Parlement, il faut à chaque fois tenir compte de la capacité du fonctionnaire à effectuer les vérifications nécessaires.

Le Parlement est d’avis que, dans le cas du plaignant, l’erreur dans le calcul du salaire de base qui s’est produite suite au changement de logiciel n’aurait pas pu être remarquée par le plaignant.

Toutefois, au sujet du paiement excessif de l’indemnité de secrétariat, le Parlement a fait remarquer que le plaignant avait été nommé fonctionnaire de catégorie D avant l’entrée en vigueur du nouveau Statut. Le Parlement précise qu’étant donné son ancienneté dans l’institution, il savait que, selon l’ancien Statut (article 4 bis, annexe Vii), seuls les fonctionnaires de catégorie C pouvaient recevoir l’indemnité de secrétariat. Dès lors, le plaignant ne pouvait conclure que des indemnités de secrétariat devaient également lui être payées au titre du nouveau Statut en tant que fonctionnaire de catégorie D.

Le Parlement a également déclaré que, bien que le plaignant ait consulté un membre du personnel de la division des Décomptes, il n’a pas clairement demandé s’il était correct qu’il reçoive les indemnités de secrétariat.

Le Parlement souligne que l’erreur de l’administration dans le versement des indemnités fixées était tellement évidente que le plaignant ne peut pas ne pas en avoir été conscient.

Le Parlement a également expliqué que le montant de 3 052,15 EUR était récupéré grâce à huit versements mensuels conformément aux principes de bonne administration.

Le Parlement conclut dès lors que sa décision du 14 février 2007 était fondée.

Les observations du plaignant

Le plaignant, en résumé, maintient sa plainte d’origine. Il souligne qu’il était conscient du fait que les fonctionnaires de catégorie D ne recevaient pas d’indemnités de secrétariat. Il fait toutefois valoir qu’après avoir reçu une confirmation écrite de l’administration selon laquelle le paiement était correct, le plaignant a pensé qu’il continuait à recevoir le même salaire sans faire de distinction entre les différentes composantes du traitement. Il ne voit pas de raison de douter de l’exactitude des informations qu’il a reçues de la part de l’administration.

Le plaignant rappelle qu’il régnait une certaine incertitude parmi le personnel au sujet du nouveau Statut. Il a dès lors pensé que le changement de catégorie lui était favorable à la lumière du nouveau Statut.

Le plaignant met l’accent sur sa bonne foi. Il considère qu’il a demandé des informations à l’administration sur son traitement et il a reçu confirmation que son salaire était correct.

Pour le plaignant, l’erreur de l’administration ne peut pas être divisée en deux parties distinctes.

LA RECHERCHE D’UNE SOLUTION À L’AMIABLE

Après examen attentif de l’avis et des observations, le Médiateur n’était pas convaincu que le Parlement ait répondu de manière adéquate à l’allégation du plaignant et à la requête s’y rapportant.

La proposition de solution à l’amiable

L’article 3, paragraphe 5, du statut du Médiateur incite celui-ci à rechercher, dans la mesure du possible, avec l’institution concernée une solution de nature à éliminer le cas de mauvaise administration et à donner satisfaction au plaignant.

Le Médiateur a dès lors soumis la proposition suivante au Parlement en vue d’une solution à l’amiable :

Le Parlement pourrait envisager d’annuler sa décision de récupérer le montant de 2 821,13 EUR(5) qui représente les indemnités de secrétariat versées au plaignant du 14 juin 2004 au 26 juin 2006.

Cette proposition était fondée sur les considérations suivantes :

1. Pour commencer, le Médiateur souligne que le fait que le paiement ait été effectué de manière excessive n’est pas contesté dans cette affaire.

2. Ensuite, le Médiateur précise que le changement de catégorie du plaignant, passant d’agent temporaire de catégorie C à fonctionnaire de catégorie D a eu lieu le 16 avril 2004. Le Médiateur note encore que, alors que les agents temporaires de catégorie C avaient le droit de percevoir des indemnités de secrétariat, les fonctionnaires de catégorie D n’y étaient pas autorisés.

Après avoir examiné les bulletins de salaire du plaignant pour les mois d’avril, mai et juin 2004 que le Parlement lui avait envoyés, le Médiateur note que la composante «indemnités de secrétariat» était clairement inscrite sur ces bulletins de salaires, et séparée des autres composantes. Il apparaît également que les indemnités de secrétariat étaient une composante du salaire net.

3. En outre, le Médiateur note dans ses observations que le plaignant lui-même savait à ce moment-là que les fonctionnaires de catégorie D ne devaient pas percevoir d’indemnités de secrétariat.

4. Au vu de ces informations, le Médiateur conclut que le plaignant était certainement conscient que le paiement des indemnités de secrétariat ne se justifiait pas quand il a contacté l’administration le 14 juin 2004 pour avoir des explications sur le montant de son salaire.

5. Le Médiateur rappelle que, selon l’article 85 du Statut, toute somme excessive sera réclamée «si celle-ci était si évidente qu’il [le bénéficiaire] ne pouvait manquer d’en avoir connaissance» (soulignement ajouté), et conclut que le remboursement des indemnités de secrétariat versées au plaignant jusqu’au 14 juin 2004 pourrait avoir semblé être justifié au titre de l’article 85 du Statut.

6. Toutefois, le Médiateur estime que, lorsque le plaignant a reçu le 14 juin 2004 une réponse à son courrier électronique du même jour, sa situation juridique changeait considérablement suite à la réponse qu’il a reçue de la part de l’administration du Parlement.

7. Dans cette réponse, la division des Décomptes, qui traite spécifiquement du calcul des salaires, a informé le plaignant que :

«Le montant de EUR 3.108,01 que vous avez reçu sur votre compte est bien le salaire net mensuel pour juin (comme fonctionnaire). Le changement de régime temporaire/fonctionnaire à partir du 16 avril a été fait dans la paie de mois de mai.»

8. Dès lors, le Médiateur estime qu’étant donné le fait que le Parlement ait informé le plaignant le 14 juin 2004 que son changement de catégorie se reflétait correctement dans le paiement de son salaire, le plaignant pouvait légitimement penser que les indemnités de secrétariat liées au changement de catégorie lui étaient correctement payées.

9. Il apparaît dès lors qu’en récupérant le montant indûment payé au plaignant pour la période du 14 juin 2004 au 26 juin 2006, le Parlement a erronément appliqué l’article 85 du Statut. Le Médiateur arrive à cette conclusion en se basant sur le fait que, après avoir reçu l’assurance du Parlement le 14 juin 2004 que son changement de catégorie se reflétait correctement sur son salaire, le plaignant n’était plus conscient que le paiement avait été excessif. Cette application injustifiée de l’article 85 du Statut pourrait constituer un cas de mauvaise administration.

La réponse du Parlement

Le Parlement répète, en résumé, les arguments qu’il avait déjà avancés dans son avis envoyé au Médiateur. Il déclare en outre que, étant donné que les conditions établies à l’article 85 du Statut sont remplies, le Parlement devait procéder au remboursement de la somme erronément payée. Il souligne à cet égard que le plaignant lui-même a reconnu dans ses observations qu’il savait qu’un fonctionnaire de catégorie D ne pouvait prétendre au bénéfice de l’indemnité de secrétariat. En outre, le Parlement ne comprend pas comment le courrier électronique du 14 juin 2004 a pu avoir pour effet de modifier la connaissance du plaignant du fait que ce paiement était erroné.

Le Parlement rappelle également que l’article 85 du Statut permet de récupérer toute somme non due dans le cadre du Règlement financier et de ses Mesures d’application(6). Le Parlement souligne que, selon les dispositions de l’article 71, paragraphe 3 du Règlement financier(7), l’institution n’a pas de marge de manœuvre quant à l’opportunité de procéder au recouvrement puisque la renonciation à la récupération est strictement limitée aux cas prévus par l’article 73, paragraphe 2 du Règlement financier et de l’article 87 des Mesures d’application.

Le Parlement souligne également qu’il a agi avec sollicitude en échelonnant les retenues sur huit mois afin d’atténuer les désagréments entraînés par l’erreur commise.

Enfin, le Parlement estime qu’il a appliqué l’article 85 du Statut conformément au principe de bonne administration et au devoir de sollicitude. Dès lors, le Parlement ne peut malheureusement pas donner une suite favorable à l’accord amiable proposé par le Médiateur.

Les observations du plaignant

Le plaignant, en résumé, exprime sa déception concernant l’assertion du Parlement selon laquelle il ne pouvait estimer que son salaire n’était pas excessif «uniquement sur la base d’un unique e-mail reçu de l’administration». Le plaignant souligne que le courrier électronique en question faisait suite à des confirmations verbales reçues de la part de l’administration.

L’appréciation du Médiateur

Sur la base de l’avis du Parlement et des observations du plaignant, le Médiateur conclut qu’aucune solution à l’amiable n’a pu être trouvée.

LA DÉCISION

1. L’accusation de recouvrement injustifié et injuste des indemnités de secrétariat

1.1 Le plaignant est un fonctionnaire du Parlement européen. Le 16 avril 2004, le plaignant est passé d’agent temporaire de catégorie C à fonctionnaire de catégorie D. Le 14 juin 2004, il a demandé par courrier électronique à l’administration si le nouveau montant de son salaire était correct. Dans sa réponse datée du même jour, un fonctionnaire de la Division des décomptes(8) du Parlement a affirmé que le montant de 3 108,01 EUR qui a été versé par le Parlement sur le compte en banque du plaignant était en effet son salaire net mensuel pour le mois de juin(9) et correspondait à sa nouvelle catégorie en tant que fonctionnaire. Le fonctionnaire du Parlement a ajouté que le changement de catégorie du plaignant en date du 16 avril 2004, passant d’agent temporaire à fonctionnaire, se reflétait dans le paiement de son salaire pour mai 2004(10). Le 26 juin 2006, le Parlement a remarqué que le salaire du plaignant avait été calculé erronément (qu’il s’agisse de ses indemnités de secrétariat ou de son salaire net) et a informé le plaignant de sa décision, prise sur la base de l’article 85 du Statut, de récupérer le montant de 3 052,15 EUR qui lui avait été payé de manière excessive sous la forme d’indemnités de secrétariat. L’administration a décidé que le paiement excessif serait récupéré dans le salaire mensuel du plaignant à partir d’avril 2006 au moyen de sept versements mensuels de 415 EUR chacun, ainsi qu’un versement final de 147,15 EUR.

Le plaignant s’est tourné vers le Médiateur européen et a avancé que le Parlement avait dans son cas appliqué à tort l’article 85 du Statut et qu’il ne prenait pas sa bonne foi en compte. Il a également allégué qu’il serait injuste que le Parlement recouvre les paiements excessifs. Le plaignant clame que le Parlement devrait annuler sa décision de récupérer le montant de 3 052,15 EUR.

1.2 Le Parlement avance en résumé que : (1) le plaignant ne pouvait pas ne pas avoir remarqué que son indemnité de secrétariat avait été erronément payée au vu de son ancienneté dans l’institution ; (ii) dans son courrier électronique du 14 juin 2004, le plaignant n’a pas clairement demandé à la Division des décomptes s’il était normal qu’il reçoive des indemnités de secrétariat.

1.3 Le 11 octobre 2007, pour les raisons expliquées aux points 1 à 9 ci-dessus, le Médiateur est arrivé à la conclusion préliminaire que, en recouvrant les indemnités de secrétariat payées au plaignant durant la période du 14 juin 2004 au 26 juin 2006, le Parlement avait appliqué à tort l’article 85 du Statut, et cette mauvaise application de l’article 85 pouvait constituer un cas de mauvaise administration. Le Médiateur a dès lors fait la proposition de solution à l’amiable suivante au Parlement : Le Parlement pourrait envisager d’annuler sa décision de récupérer le montant de 2 821,13 EUR(11) qui représente les indemnités de secrétariat versées au plaignant du 14 juin 2004 au 26 juin 2006.

1.4 Dans sa réponse à la proposition ci-dessus, le Parlement maintient qu’il a agi conformément aux dispositions légales pertinentes et que le plaignant n’aurait pas pu ne pas se rendre compte que ses indemnités de secrétariat avaient été erronément payées suite à l’unique courrier électronique du Parlement du 14 juin 2004. Le Parlement avance également que l’institution n’a pas de marge de manœuvre quant à l’opportunité de procéder au recouvrement puisque la renonciation à la récupération est strictement limitée aux cas prévus par le Règlement financier et ses Mesures d’application.

1.5 Au début, selon le Médiateur, il apparaît que le Parlement interprète le comportement du plaignant comme de la mauvaise foi. Le Médiateur ne peut accepter cette interprétation des faits. Le Médiateur estime que le Parlement pourrait pertinemment douter de la bonne foi du plaignant s’il n’avait contacté l’administration du Parlement pour l’informer de ses doutes quant au montant de son salaire (et dès lors, de ses indemnités de secrétariat).

1.6 En outre, le Médiateur souligne que, selon la jurisprudence communautaire, dès que les fonctionnaires ou agents informent l’administration de leurs doutes quant au paiement de leur salaire, il est de la responsabilité de l’administration de procéder aux vérifications nécessaires(12).

Dans l’affaire qui nous concerne, la compétence de procéder aux vérifications nécessaires revenait à la Division des décomptes du Parlement. Suite à ces vérifications, la Division des décomptes a confirmé que le changement de catégorie du plaignant se reflétait correctement dans le paiement de son salaire. Dès lors, le Médiateur considère qu’à partir du moment où il a reçu cette confirmation de la part de la Division des décomptes, le plaignant pouvait légitimement considérer que les indemnités de secrétariat liées à son changement de catégorie lui étaient correctement versées.

1.7 Le Médiateur souhaite également souligner à cet égard que la confirmation écrite du montant du salaire du plaignant a été faite par la Division des décomptes, qui est l’autorité compétente au Parlement pour traiter les questions du plaignant, et qu’elle a suivi des confirmations orales sur ce sujet, reçues à plusieurs occasion par le plaignant et émises par la même division.

1.8 Le Médiateur reste convaincu que, suite au courrier électronique et aux confirmations verbales énoncées ci-dessus de la part de la division compétente, le plaignant pouvait raisonnablement cesser de douter du calcul de son salaire. D’un autre côté, le Médiateur reste tout aussi convaincu que, au vu de ce courrier électronique et de ces confirmations, le plaignant pouvait avoir pensé que le calcul était en effet correct.

1.9 Le Médiateur note également que le Parlement estime que, selon l’article 71, paragraphe 3, du Règlement financier, l’institution n’avait pas de marge de manœuvre pour procéder au recouvrement. Le Parlement ajoute que la renonciation à la récupération est strictement limitée aux cas prévus par l’article 73, paragraphe 2 du Règlement financier et ses Mesures d’application.

Le Médiateur note toutefois que les articles mentionnés ci-dessus font également référence à des affaires où le recouvrement peut-être évité quand il n’est pas conforme au principe de proportionnalité. En fait, l’article 73, paragraphe 2 du Règlement financier établit clairement la possibilité générale d’éviter le recouvrement. Toutefois, l’article 87, paragraphe 1, point c de la mise en application pourrait en effet constituer une base solide pour considérer ce recouvrement comme disproportionné. En outre, l’article 87, paragraphe 2 de la Mise en application stipule les motifs formels pouvant justifier une telle décision. Une application raisonnable des points a et b au moins de l’article 87, paragraphe 2, iraient clairement en faveur de l’exemption de recouvrement dans l’affaire qui nous occupe. Le Médiateur estime dès lors que l’explication du Parlement, comme il l’a présentée dans son avis envoyé au Médiateur, n’examine pas correctement toutes les possibilités d’exemption du recouvrement de la somme indûment payée.

1.10 Enfin, le Médiateur souligne que les sommes d’argent litigieuses (qu’elles soient considérées dans leur totalité ou en tranches de versement) constituent raisonnablement une somme importante pour tout budget familial, et plus spécialement pour le budget d’une famille incluant une personne handicapée. Tout employeur responsable par définition du bien-être de son personnel devrait adopter une attitude plus humaine et simplement prendre ceci en compte quand il demande à son personnel de rembourser des sommes dont il considérait légitiment qu’elles lui étaient dues sur la base des informations fournies par cet employeur. Le Médiateur partage dès lors la déception exprimée par le plaignant, un membre du personnel du Parlement européen, quant à la position du Parlement dans cette affaire.

1.11 Au vu de ces informations, le Médiateur estime que le Parlement devrait examiner si les règles applicables, en plus d’être justes et raisonnables, permettent d’annuler le recouvrement du montant de 2 821,13 EUR, somme qui représente les indemnités de secrétariat versées au plaignant du 14 juin 2004 au 26 juin 2006.

2 Conclusion

Au vu de ces informations, le Médiateur émet le projet de recommandation suivant à destination du Parlement, conformément à l’article 3, paragraphe 6 du Statut du Médiateur :

Le Parlement devrait examiner s’il est conforme aux dispositions du Règlement financier, telles que mentionnées au point 1.9, en plus d’être juste et raisonnable, d’annuler le recouvrement du montant de 2 821,13 EUR, qui représentent les indemnités de secrétariat payées au plaignant du 14 juin 2004 au 26 juin 2006.

Le Parlement et le plaignant seront informés de ce projet de recommandation. Conformément à l’article 3, paragraphe 6 du Statut du Médiateur, le Parlement enverra un avis détaillé d’ici le 30 avril 2008. L’avis détaillé peut être l’acceptation du projet de recommandation du Médiateur et une description des mesures prises pour le respecter.

Strasbourg, le 21 janvier 2008

 

P. Nikiforos DIAMANDOUROS


(1) Décision 94/262 du 9 mars 1994 du Parlement européen concernant le statut et les conditions générales d'exercice des fonctions du Médiateur, JO 1994 L 113, p. 15.

(2) Affaire T-122/95 Chabert / Commission [1996] ECR-SC I-A-19 et II-63.

(3) Dans l’original : «vous avez contacté l'unité des Décomptes - à une seule reprise - afin de savoir si la somme versée sur votre compte bancaire correspondait à votre traitement mensuel net du mois de juin 2004».

(4) Affaire T-122/95 Chabert / Commission [1996] ECR-SC I-A-19 et II-63.

(5) On arrive à cette somme en soustrayant les indemnités de secrétariat pour la période du 16 avril au 14 juin 2004 du montant de 3 052,15 EUR.

(6) Règlement de la Commission (CE, Euratom) n° 2342/2000 du 23 décembre 2002 précisant les règles détaillées pour l’application du règlement du Conseil (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO 2002 L 357, p. 1).

(7) Selon l’article 71, paragraphe 3 du Règlement financier : «Les montants indûment payés seront recouvrés.»

(8) Voir note 1.

(9) Voir note 2.

(10) Le courrier électronique du fonctionnaire envoyé au plaignant disait ceci : «Le montant de EUR 3108,01 que vous avez reçu sur votre compte est bien le salaire net mensuel pour juin (comme fonctionnaire). Le changement de régime temporaire/fonctionnaire à partir du 16 avril a été fait dans la paie de mois de mai.» Traduction par les services du Médiateur. Le texte français original se trouve à la note 3.

(11) On arrive à cette somme en soustrayant les indemnités de secrétariat pour la période du 16 avril au 14 juin 2004 du montant de 3 052,15 EUR.

(12) Affaire T-107/92 White / Commission [1994] ECR-SC I-A-41 et II-143, paragraphe 42.