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Décision du Médiateur européen clôturant son enquête sur la plainte 603/2008/OV contre la Commission européenne

Le plaignant est un architecte qui n'a pas été retenu à l'issue de sa participation à un concours international portant sur le quartier européen de Bruxelles en 1997. La région Bruxelles-capitale, qui était l'autorité contractante, a signé un contrat avec le lauréat du concours. En réponse à une première plainte pour manquement déposée le 9 février 2001, la Commission a envoyé un avis motivé aux autorités belges, concluant que la région Bruxelles-capitale avait enfreint les dispositions de la directive 92/50/CEE portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services en ce qui concerne, notamment, l'obligation de garantir l'anonymat des projets et l'indépendance du jury. En 2001, les autorités belges se sont engagées plusieurs fois envers la Commission, à mettre fin au contrat faisant l'objet du litige, au vu de quoi la Commission a clôturé la plainte pour manquement au mois d'avril 2002.

En décembre 2006, le plaignant a déposé une deuxième plainte pour manquement auprès de la Commission, affirmant que les autorités belges n'avaient pas respecté leurs engagements. Le plaignant a notamment souligné que les autorités belges avaient rédigé un avenant (avenant n° 6) au contrat.

En février 2008, le plaignant s'est adressé au Médiateur en affirmant que la Commission n'avait pas été en mesure de contraindre les autorités belges à respecter leur engagement de respecter l'avis motivé de la Commission en date du 9 février 2001, et à mettre définitivement fin au contrat. Dans son avis, la Commission a indiqué que son enquête ne lui avait pas permis de conclure qu'en exécutant l'avenant n° 6, les autorités belges avaient manqué à leurs engagements.

Après avoir consulté les dossiers de procédure en manquement de la Commission, le Médiateur est parvenu à la conclusion que l'avenant en question ne représentait pas une modification du contrat allant à l'encontre des engagements pris par les autorités belges. Aucun motif de mauvaise administration n'a été soulevé. Le Médiateur a cependant remarqué que la manière dont la Commission a présenté les engagements pris par les autorités belges au plaignant en 2001 et 2002 semble différente de la description qu'elle en a faite au cours de la présente enquête.

LE CONTEXTE DE LA PLAINTE

1. En 1997, le plaignant a participé au concours international d'architecture pour le quartier européen de Bruxelles intitulé "Concours international d'Architecture - Aménagement de l'espace public dans le Quartier Européen de Bruxelles". Le concours était également connu sous le nom "Les sentiers de l'Europe". Ce concours international était organisé à l'initiative du Ministre des travaux publics de la région de Bruxelles-Capitale et de M. Erkki Liikanen, qui était alors Commissaire européen. La région de Bruxelles-Capitale et l'Union européenne ont chacune contribué à hauteur de 50% au financement du projet. La Société Centrale d'Architecture de Belgique (SCAB) était chargée de l'organisation générale du concours, qui comportait deux étapes. Le 24 avril 1998, la SCAB a annoncé les résultats du concours, un contrat ayant ensuite été signé avec le lauréat (ci-après, "le lauréat"). La proposition du plaignant se classait en troisième position. Les 5 et 16 juin et le 8 juillet 1998, le plaignant a écrit au Commissaire Liikanen au sujet de ce résultat.

2. Le 8 juillet 1998, le plaignant a déposé une plainte pour infraction auprès de la direction générale XV de la Commission (l'actuelle direction générale Marché intérieur et services - DG MARKT). Il affirmait notamment que les autorités belges avaient enfreint la directive 92/50/CEE portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services[1] (ci-après, "la directive"). Son argument principal était que les critères d'évaluation et la composition du jury du concours (ci-après, "le jury") n'étaient pas conformes au règlement du concours.

3. Le 21 septembre 1998, le plaignant a déposé une plainte auprès du Médiateur européen (1021/1998/OV) contre le Conseil de l'Union européenne, la Commission et le Parlement européen. Il avançait que la directive et le règlement du concours d'architecture n'avaient pas été respectés par l'Union européenne dans son rôle d'autorité contractante, ni par les membres du jury. Il affirmait ensuite que certains membres du jury étaient des représentants des institutions européennes. Le plaignant demandait l'annulation du concours ainsi qu'une indemnisation. Le 27 octobre 1998, le Médiateur a informé le plaignant que sa plainte était irrecevable en raison du fait qu'il n'avait pas entrepris les démarches administratives préalables. Il expliquait en outre qu'il n'était pas en mesure de traiter la plainte car les services de la DG XV de la Commission étaient en train d'examiner sa plainte pour infraction du 8 juillet 1998.

4. Le 7 décembre 1998, la Commission a accusé réception de la plainte déposée par le plaignant le 8 juillet 1998 et l'a informé que celle-ci avait été enregistrée par son secrétariat général sous la référence 98/5025. La Commission a ouvert une procédure d'infraction concernant les allégations du plaignant. Le 4 novembre 1999, l'institution a envoyé une lettre de mise en demeure aux autorités belges sur la base de l'ancien article 226 du traité CE, l'actuel article 258 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). La lettre de mise en demeure concernait la violation présumée de l'article 13, paragraphe 6, de la directive[2], l'anonymat des candidats participants ayant été levé lors de la seconde étape du concours. Le 4 février 2000, à la suite d'une question parlementaire écrite relative à l'indépendance et à l'impartialité des membres du jury à l'égard des candidats, la Commission s'est une nouvelle fois adressée aux autorités belges pour leur demander des informations complémentaires.

5. Le 12 avril 2000, le plaignant a saisi le Médiateur d'une deuxième plainte (505/2000/(OV)SM). Il avançait i) qu'il n'avait reçu aucune information de la part de la Commission concernant l'issue de sa plainte pour infraction du 8 juillet 1998 ; ii) que la Commission n'avait pas répondu à quatre de ses lettres ; et iii) que la directive et le règlement du concours avaient été enfreints par la Commission et la région de Bruxelles-Capitale en deux points : premièrement, les membres du jury n'avaient pas agi de façon indépendante et impartiale et, deuxièmement, la décision d'octroi du contrat ne lui avait pas été communiquée dans les 15 jours suivant la décision du jury. Le 18 mai 2000, le Médiateur a ouvert une enquête concernant les deux premières allégations. Il a ensuite informé le plaignant que, étant donné que l'objet de sa troisième allégation était en train d'être examiné par le Conseil d'État belge, il n'était pas habilité à se prononcer concernant celle-ci. L'ancien article 195 du traité CE, l'actuel article 228 du TFUE, dispose en effet que le Médiateur procède à des enquêtes "sauf si les faits allégués font ou ont fait l'objet d'une procédure juridictionnelle." Le 30 août 2001, le Médiateur a clos son enquête et a informé le plaignant de sa décision, qui concluait à l'absence de mauvaise administration de la part de la Commission relativement aux premier et deuxième griefs du plaignant.

6. Par une lettre du 26 janvier 2001, la Commission a informé le plaignant que, le 21 décembre 2000, la décision avait été prise d'envoyer un avis motivé aux autorités belges, puisqu'elle estimait que l'article 13, paragraphe 6, de la directive avait été violé. La Commission soulignait notamment que l'autorité contractante n'avait pas respecté l'obligation de garantir l'anonymat des projets. En outre, le jury n'avait pas fondé sa décision exclusivement sur les critères définis dans l'avis de concours (et les documents relatifs au concours) et sur la pondération indiquée. Par ailleurs, l'obligation de garantir l'indépendance du jury n'avait pas été respectée. Concernant ce dernier point, la Commission a fait valoir qu'il semblait exister des liens économiques directs entre le président du jury et le candidat placé en deuxième position, ainsi qu'entre un autre membre du jury et le lauréat. L'avis motivé de la Commission avait été transmis aux autorités belges le 9 février 2001.

7. Par une lettre du 12 avril 2001, les autorités belges ont informé les services de la Commission des engagements qu'elles avaient pris en réponse à l'avis motivé de la Commission du 9 février 2001. Le 14 juin 2001, la Commission a demandé des précisions. Par une lettre datée du 24 septembre 2001, les autorités belges ont répondu à cette demande en précisant leurs engagements. Le 12 octobre 2001, une réunion a eu lieu entre les services de la Commission et des représentants de la région de Bruxelles-Capitale. Le 6 novembre 2001, les autorités belges ont envoyé une nouvelle lettre à la Commission concernant le suivi de l'avis motivé.

8. Par une lettre du 6 novembre 2001, la DG MARKT a fait savoir au plaignant que, lors des discussions du 12 octobre 2001, les représentants de la région de Bruxelles-Capitale avaient expressément reconnu que les réserves exprimées par la Commission dans son avis motivé du 9 février 2001 étaient fondées. Cette lettre informait en outre le plaignant que "[l]es représentants des autorités belges ont également indiqué que les ministres compétents avaient décidé, suite à l'avis motivé de la Commission, de mettre définitivement fin au contrat litigieux et de ne plus donner aucun ordre de service dans le cadre de ce contrat." La DG MARKT a expliqué qu'elle n'estimait donc pas opportun de soumettre l'affaire à la Cour de justice des Communautés européennes et qu'elle allait ainsi suggérer à la Commission de clore l'affaire. À la suite de cette lettre de pré-clôture du 6 novembre 2001, la Commission a clos la procédure d'infraction le 24 avril 2002.

9. Le 30 octobre 2002, le plaignant a envoyé à la Commission une lettre dans laquelle il soutient que les autorités belges n'avaient pas respecté les engagements pris en 2001. Il faisait valoir que, le 22 mars 2001, un avenant n° 5 au contrat en cause avait été conclu entre la région de Bruxelles-Capitale et le lauréat, pour un montant d'environ 6 000 000 BEF. Cet avenant avait trait aux travaux de réaménagement du parc Léopold, qui est situé dans le quartier européen de Bruxelles. Le plaignant a souligné que le chantier du parc Léopold était entouré de panneaux sur lesquels figurait le nom du lauréat.

10. La Commission a répondu au plaignant par une lettre du 21 novembre 2002, dans laquelle elle indiquait que "[...] la Commission a été informée de l'intention des autorités belges de mettre fin au contrat litigieux par lettre du 12 avril 2001." Par ailleurs, en réponse à une demande de clarification des services de la Commission, les autorités belges, par une lettre du 24 septembre 2001, "ont effectivement précisé que les ministres compétents s'étaient engagés à ne pas donner de nouveaux ordres de services dans le cadre du contrat litigieux." La Commission en a conclu que, compte tenu de ces circonstances, les autorités belges s'étaient effectivement conformées à l'avis motivé bien qu'elles se soient, au départ, opposées aux conclusions de celui-ci. Elle a ensuite fait valoir que les panneaux sur lesquels figurait le nom du lauréat sur le lieu du chantier ne prouvaient pas que les autorités belges avaient donné de nouveaux ordres de services après s'être formellement engagées à ne pas le faire dans leurs lettres du 12 et du 24 septembre 2001. La Commission concluait sa lettre en indiquant que les autorités belges l'avaient informé que la mission confiée au lauréat serait considérée comme ayant pris définitivement fin après la réception des travaux du parc Léopold par la région de Bruxelles-Capitale assistée du lauréat. La Commission estimait donc que la signature de l'avenant n° 5 au contrat n'était pas contraire aux engagements pris par les autorités belges.

11. Quatre ans plus tard, le 4 décembre 2006, le plaignant a déposé une nouvelle plainte auprès de la Commission, soutenant que les autorités belges n'avaient pas respecté les engagements pris en 2001. Il affirmait en particulier que les ministres responsables ne s'étaient pas conformés à l'avis motivé de la Commission du 9 février 2001, puisqu'au lieu de mettre fin au contrat en question, elles avaient en réalité augmenté son montant de 226 779, 41 EUR, en le portant de 491 689, 63 EUR à 718 469, 05 EUR (à la suite des avenants n° 1 à 6), soit une hausse de 45% de sa valeur. Le plaignant a ensuite avancé que les autorités belges avaient enfreint l'article 7, paragraphe 1, de la directive[3] en octroyant un contrat dont la valeur excédait le seuil de 200 000 EUR alors qu'elles étaient censées ne pas donner de nouveaux ordres de services dans le cadre du contrat. Le plaignant a donc demandé à la Commission de rouvrir sa précédente plainte pour infraction 98/5025 et de porter l'affaire devant la Cour de justice. Le 27 décembre 2006, la Commission a accusé réception de cette lettre.

12. Le 19 janvier 2007, les services de la Commission ont appelé le plaignant afin de lui demander des informations complémentaires. Par des lettres du 8 et du 15 février 2007, le plaignant a fourni des précisions à la Commission. Dans sa lettre du 15 février 2007, il a également indiqué qu'il ne pouvait concevoir que la Commission, compte tenu des entretiens qu'elle avait eu avec les autorités belges, puisse accepter que de nouveaux ordres de service, représentant 45% de la valeur du contrat initial, soient donnés dans le cadre de ce même contrat.

13. Par une lettre du 20 avril 2007, le plaignant a demandé à la Commission d'enregistrer officiellement sa plainte et de répondre à sa correspondance. Le 12 juin 2007, le Secrétariat général de la Commission a fait savoir au plaignant que sa plainte pour infraction avait été enregistrée sous la référence 2007/4421 et qu'il serait informé des résultats de l'enquête qui serait menée par les services de la Commission.

14. Par une lettre du 26 janvier 2008, le plaignant a demandé à la Commission de l'informer de l'état d'avancement de l'enquête.

15. Le 23 février 2008, le plaignant a saisi le Médiateur de la présente plainte (603/2008/OV).

16. Par une lettre du 3 mars 2008, la DG MARKT a informé le plaignant qu'elle avait adressé aux autorités belges, le 18 février 2008, une lettre "pré-226". Le 28 mars 2008, les autorités belges ont répondu, affirmant qu'elles n'avaient pas enfreint les engagements pris en 2001.

17. Par une lettre du 27 mars 2008, dont une copie a également été transmise au Médiateur, le plaignant a demandé à la Commission de lui verser une indemnisation pour le préjudice qu'il estimait avoir subi. La Commission ne lui a pas répondu. Par conséquent, le 23 mai 2008 le plaignant a écrit au Médiateur, renouvelant sa demande d'indemnisation. Par une lettre du 23 mai 2008, la Commission a répondu à la lettre du plaignant du 27 mars 2008, rejetant sa demande d'indemnisation.

18. Le 26 juin 2008, la DG MARKT a fait parvenir au plaignant une lettre de pré-clôture. Elle lui faisait savoir que, comme l'indiquait son préambule, l'avenant n° 6 visait à préciser le contenu de la mission de l'architecte (c'est-à-dire le lauréat) ou à l'élargir dans certaines limites. Les autorités belges ont souligné que l'avenant ne visait pas à prolonger le contrat concerné, ce qui aurait été contraire aux engagements qu'ils avaient pris, mais à fixer les droits et obligations des parties en vue de la cessation du contrat. La DG MARKT affirmait que l'avenant n° 6 ne modifiait pas de façon substantielle le contrat concerné et soulignait que l'élargissement des missions relatives à la phase 8, concernant le parc Léopold, demeurait dans le champ d'application de ce qui avait été convenu dans les avenants n° 1 à 5, qui étaient antérieurs aux engagements pris par les autorités belges en 2001. Elle soulignait que la valeur totale du contrat, à savoir 869 347, 58 EUR était inférieure au montant maximum de 870 612, 17 EUR mentionné dans les engagements pris par les autorités belges en 2001. La DG MARKT a également indiqué que, d'après les informations dont elle disposait, les autorités belges n'avaient pas, après avoir pris ces engagements, passé de marché public dont la valeur estimée aurait été supérieure au seuil prévu par la directive. Elle a ensuite attiré l'attention du plaignant sur le fait que le contrat concerné semblait avoir déjà épuisé tous ses effets. Sur la base de ce qui précède la DG MARKT a conclu que les informations dont elle disposait n'étaient pas suffisantes pour justifier l'ouverture d'une procédure d'infraction et qu'elle allait donc suggérer que la Commission classe la plainte pour infraction, à moins que le plaignant ne présente de nouvelles informations dans un délai de quatre semaines.

19. Le 20 juillet 2008, le plaignant a répondu par une lettre, avançant que la Commission n'avait pas agi en temps utile pour mettre fin aux infractions à la directive. Le 13 août 2008, la DG MARKT a répondu en indiquant qu'il existait deux raisons de classer la plainte pour infraction n° 98/5025. Tout d'abord, les autorités belges avaient reconnu les infractions et, ensuite, elles avaient décidé de mettre un terme au contrat concerné. Elle a ensuite souligné qu'elle n'avait eu connaissance de la conclusion de l'avenant n° 6 qu'à l'occasion du dépôt, par le plaignant, de sa nouvelle plainte le 4 décembre 2006. Elle a précisé qu'elle avait étudié cet avenant et avait conclu qu'il ne contenait aucun élément justifiant l'ouverture d'une procédure d'infraction. La DG MARKT a donc décidé de proposer le classement de l'affaire.

20. Le 18 septembre 2008, la Commission a classé la plainte pour infraction.

LE SUJET DE L'ENQUÊTE

21. Le 23 février 2008, le plaignant a déposé une plainte auprès du Médiateur contenant les allégations suivantes :

  1. La Commission n'a pas exigé de l'État belge la stricte application immédiate de l'avis motivé du 9 février 2001. À cet égard, le plaignant fait valoir que l'avenant n° 6, portant sur la somme de 202 709, 40 EUR, a été conclu en décembre 2002 et que, le 15 octobre 2003, les travaux étaient toujours en cours dans le parc Léopold.
  2. La Commission a fait défaut en acceptant que les autorités belges accordent au lauréat des honoraires supplémentaires de 226 779, 41 EUR.
  3. La Commission a fait défaut en acceptant que les autorités belges accordent au lauréat la phase complémentaire n° 8 (objet de l'avenant n° 6) pour le parc Léopold, sans autre procédure.
  4. La Commission a fait défaut en estimant qu'il n'était pas nécessaire de poursuivre l'État belge devant la Cour de justice.
  5. La Commission a cautionné et cofinancé (à concurrence de 50%) un concours irrégulier. L'obligation de garantir l'anonymat des projets a été violée.
  6. La Commission est juge et partie dans cette affaire et ne peut donc pas défendre en toute équité le plaignant.
  7. La Commission n'a pas relancé le concours international d'architecture.

22. Dans sa plainte du 23 février 2008, le plaignant a également fait valoir que la Commission devrait lui accorder une indemnisation, tout en précisant qu'il n'avait pas encore contacté cette institution à cet égard.

23. Dans sa lettre du 19 mars 2008, ouvrant la présente enquête, le Médiateur a résumé les allégations exposées ci-dessus en une seule allégation, au sujet de laquelle la Commission a été invitée à présenter ses observations : "La Commission a manqué de garantir que les autorités belges se tiennent strictement à leur engagement d'exécuter son avis motivé du 9 février 2001 et de mettre définitivement fin au contrat litigieux."

24. Le Médiateur a informé le plaignant que sa demande d'indemnisation n'était pas recevable puisqu'il n'avait pas au préalable effectué de démarches administratives auprès de la Commission concernant cet aspect de l'affaire. Le 23 mai 2008, le plaignant a fait savoir au Médiateur qu'il avait déposé une demande d'indemnisation à la Commission par une lettre du 27 mars 2008, mais que cette lettre était restée sans réponse. Le Médiateur a donc décidé d'inclure cette demande dans son enquête et a écrit à la Commission le 18 juin 2008 pour lui demander d'émettre un avis concernant l'affirmation du plaignant selon laquelle "la Commission devrait l'indemniser du préjudice subi qu'il estime s'élever à 295 654 EUR".

L'ENQUÊTE

25. La plainte a été transmise à la Commission afin qu'elle émette un avis. Le 20 juillet et le 1er septembre 2008, le plaignant a envoyé à la Commission et au Médiateur la même nouvelle lettre. Le Médiateur lui a répondu le 11 septembre 2008.

26. La Commission a communiqué son avis le 25 septembre 2008, lequel a été transmis au plaignant, qui a envoyé ses observations le 28 novembre et le 9 décembre 2008.

27. Le 18 juin et le 6 juillet 2009, les services du Médiateur ont effectué une inspection des dossiers pertinents à la DG MARKT. Le 20 juillet 2009, le Médiateur a envoyé un exemplaire du rapport d'inspection à la Commission et au plaignant. Le 6 août 2009, le plaignant a transmis ses observations concernant le rapport d'inspection.

28. Le 28 septembre et les 13, 16 et 21 octobre 2009, les services du Médiateur et le plaignant se sont entretenus au téléphone. Les 7 et 13 octobre 2009, le plaignant a envoyé de nouvelles lettres au Médiateur. Le 14 octobre 2009, le plaignant a également écrit à l'Office européen de lutte antifraude (OLAF), lui indiquant qu'il n'avait pas reçu de réponse motivée du Médiateur concernant la plainte qu'il avait déposée en 1998. Le 12 novembre 2009, le Médiateur a répondu aux lettres du plaignant des 7 et 13 octobre 2009. Dans cette lettre, il faisait également référence au courrier envoyé le 14 octobre 2009 par le plaignant à l'OLAF et a donc également transmis une copie de sa réponse à l'OLAF.

29. Le 19 novembre 2009, le plaignant a répondu à la lettre du Médiateur du 12 novembre 2009. Le plaignant avait joint à sa lettre un document de 6 pages résumant les éléments de l'affaire survenus entre 1998 et 2001. Le 21 novembre 2009, le plaignant a fait parvenir au Médiateur une copie de la lettre datée du même jour qu'il avait envoyée à l'OLAF. Le 10 décembre 2009, le Médiateur a répondu à la lettre du plaignant du 19 novembre 2009. Le 11 décembre 2009, le plaignant a envoyé une nouvelle lettre au Médiateur, à laquelle ce dernier a répondu le 21 décembre 2009.

L'EXAMEN ET LES CONCLUSIONS DU MÉDIATEUR

A. Les remarques préliminaires

30. Dans sa lettre du 19 mars 2008 ouvrant son enquête, le Médiateur a observé que le point 8 de la communication de la Commission au Parlement européen et au Médiateur européen concernant les relations avec le plaignant en matière d'infractions au droit communautaire[4] (ci après, "la communication") dispose que la Commission instruit les plaintes enregistrées en vue d'aboutir à une décision dans un délai maximum d'un an "à dater de l'enregistrement de la plainte par le Secrétariat général." Il a souligné que la plainte pour infraction déposée par le plaignant avait été enregistrée en juin 2007 et que ce délai n'avait donc pas expiré en mars 2008, lorsque le plaignant avait déposé une plainte auprès de ses services. Le Médiateur a toutefois fait valoir que la date à laquelle le plaignant avait effectivement déposé sa plainte était le 4 décembre 2006. Cette date était également mentionnée dans la lettre de la Commission du 12 juin 2007 informant le plaignant que sa plainte avait été enregistrée. Dans sa lettre, le Médiateur a attiré l'attention de la Commission sur le point 4 de la communication, qui dispose qu'un accusé de réception devrait être émis dans les quinze jours après réception et qu'une plainte devrait être enregistrée dans un délai d'un mois à dater de l'envoi du premier accusé de réception.

31. Dans son avis, la Commission s'est excusée auprès du plaignant pour avoir tardé à enregistrer sa plainte pour infraction dans la présente affaire. Le plaignant n'a pas fait de commentaires sur ce point dans ses observations.

32. Étant donné que la Commission a reconnu avoir tardé à enregistrer la plainte du plaignant et qu'elle s'en est excusée, le Médiateur estime qu'il n'est pas nécessaire de procéder à une enquête complémentaire en ce qui concerne cet aspect de l'affaire.

33. Le Médiateur observe que les faits à la base de la présente plainte datent de 1997, lorsque le concours architectural a été lancé. En 1998 et en 2000, le plaignant a déposé deux plaintes auprès du Médiateur concernant la première plainte pour infraction n° 98/5025, qui avait été déposée auprès de la Commission le 8 juillet 1998. Le plaignant a saisi le Médiateur de la présente plainte après avoir déposé sa deuxième plainte pour infraction auprès de la Commission, le 4 décembre 2006. La deuxième plainte pour infraction se fondait sur l'argument selon lequel la Commission n'aurait pas exigé des autorités belges qu'elles respectent les engagements pris en 2001 en réponse à l'avis motivé délivré par la Commission en lien avec la première plainte pour infraction. C'est donc cette allégation qui fait l'objet de la présente enquête. En septembre et octobre 2009, lors de conversations téléphoniques avec les services du Médiateur, le plaignant a avancé que le Médiateur devrait examiner l'affaire dans son intégralité, y compris les points qu'il soulevait dans sa première plainte pour infraction. À cet égard le plaignant, dans ses observations, a également fait référence à la correspondance qu'il a entretenue avec la Commission à partir de 1998. Le 13 octobre 2009, le plaignant a envoyé une nouvelle lettre au Médiateur, dans laquelle il résumait le contenu de la correspondance échangée entre lui et la Commission en 2000 et en 2001. Le plaignant a aussi évoqué les allégations présentées dans ses deux plaintes précédentes, numérotées 1021/1998/OV et 505/2000/(OV)SM, et indiqué que sa plainte actuelle était relative au même litige. Le 19 novembre 2009, le plaignant a transmis une nouvelle lettre au Médiateur, qui comprenait un résumé des faits de 6 pages. Il faisait une nouvelle fois référence aux points soulevés dans les plaintes 1021/98/OV et 505/2000/(OV)SM et aux faits survenus entre 1998 et 2001. Il ajoutait que, sur la base de ces éléments, il ne pouvait pas admettre l'idée selon laquelle la Commission avait agi conformément aux principes de bonne administration. En réponse aux observations du plaignant, le Médiateur souligne que la présente enquête est axée sur l'allégation selon laquelle "la Commission a manqué de garantir que les autorités belges se tiennent strictement à leur engagement d'exécuter son avis motivé du 9 février 2001 et de mettre définitivement fin au contrat litigieux." Afin de traiter cette allégation le Médiateur doit évidemment étudier quelle a été la réaction des autorités belges à l'avis motivé de la Commission du 9 février 2001 et quelle a été la réponse de la Commission au suivi de l'avis motivé par les autorités belges. Cet examen n'implique toutefois pas que le Médiateur se penche à nouveau sur la façon dont la Commission a traité la première plainte pour infraction numérotée 98/5025 ou évalue le contenu de la correspondance échangée entre le plaignant et la Commission depuis 1998.

34. Dans ses observations, le plaignant a souligné que le véritable problème en l'espèce était que la Commission avait pris en charge 50% des frais d'un concours architectural qui enfreignait le droit communautaire. C'était l'une des allégations présentées par le plaignant dans la plainte dont il a saisi le Médiateur le 23 février 2008. Dans ses observations concernant le rapport d'inspection, le plaignant a à nouveau affirmé que sa plainte concernait non seulement l'allégation identifiée par le Médiateur, mais également les points 5 à 7 de sa plainte du 23 février 2008, à savoir que i) la Commission avait cautionné et cofinancé ce concours présumé irrégulier ; ii) la Commission était juge et partie dans cette affaire et ne pouvait donc pas défendre en toute équité le plaignant ; et iii) la Commission n'avait pas relancé ce concours. Lorsqu'il a ouvert la présente enquête, le Médiateur a résumé les griefs du plaignant en une allégation unique et demandé à la Commission de lui communiquer ses observations. Le plaignant n'a alors pas émis d'objection à l'approche du Médiateur. Par ailleurs, en ce qui concerne le cofinancement par la Commission du concours concerné, le Médiateur observe que, déjà en 1997, il était connu que l'Union européenne finançait la moitié des frais dudit concours, puisque cette information figurait dans les documents du concours. L'avant-propos du règlement du concours, rédigé par M. Liikanen, qui était alors Commissaire européen, précisait que le concours était "financé à concurrence de 50% par les institutions européennes au même titre que par la Région de Bruxelles-Capitale." Le Médiateur observe toutefois que le plaignant n'a, ni dans la plainte n° 1021/1998/OV du 21 septembre 1998, ni dans la plainte n° 505/2000/(OV)SM du 12 avril 2000, présenté d'allégation relative à ce fait. Cette question a été soulevée pour la première fois dans la présente plainte, déposée le 23 février 2008. Cependant, à cette date, cela faisait plus de deux ans que le plaignant avait connaissance du fait sur lequel se base son allégation. Cette question ne pouvait donc en aucun cas être incluse dans la présente enquête, étant donné que l'article 2, paragraphe 4, du statut du Médiateur indique que "[l]a plainte doit être introduite dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les faits qui la justifient sont portés à la connaissance du plaignant [...]"

35. Le 9 décembre 2008, le plaignant a transmis au Médiateur une copie de la lettre adressée à la SCAB, datée du 22 juin 2000, par M. B., fonctionnaire au Secrétariat général du Conseil de l'Union européenne et membre du jury. Dans cette lettre, M. B. affirmait qu'il n'avait pas été manipulé et qu'il avait assumé en toute impartialité son rôle de membre du jury. Le plaignant a estimé que les déclarations de M. B. n'étaient pas acceptables. Le Médiateur souhaiterait souligner que la présente enquête concerne la Commission et non le Conseil. Si le plaignant désire formuler des allégations à l'encontre du Conseil, il peut déposer une nouvelle plainte après avoir effectué les démarches préalables appropriées auprès de cette institution.

36. Dans ses observations concernant le rapport d'inspection, le plaignant a déploré que la Commission n'ait pas joint au rapport d'inspection la correspondance qu'il avait échangée avec les Commissaires Liikanen et Monti en juin et juillet 1998 qui était, selon lui, essentielle pour bien comprendre la présente affaire. Le Médiateur souhaiterait souligner que l'argument du plaignant semble fondé sur un malentendu, à savoir que le plaignant pense que le rapport d'inspection a été établi par les services de la Commission et non pas par le Médiateur.

37. Dans ses observations, le plaignant a soutenu que la Commission elle-même avait enfreint le droit de l'Union européenne dans cette affaire, étant donné que l'autorité contractante était composée de la région de Bruxelles-Capitale et de l'Union européenne. Toutefois, la Commission, dans son avis sur la plainte, a indiqué que l'autorité contractante était la région de Bruxelles-Capitale. Le Médiateur observe que la Commission a expliqué ce point au plaignant dans une lettre du 24 novembre 1998. Dans cette lettre, la Commission faisait référence aux précédentes lettres envoyées par le Commissaire Liikanen au plaignant, qui faisaient valoir que le rôle de la Commission, du Conseil et du Parlement dans le concours se limitait à participer à son financement et à faire partie du jury. Le Médiateur observe que le règlement du concours est quelque peu ambigu concernant ce point. Par exemple, alors que le point 2.1.1 dudit règlement laisse entendre que le concours concerné serait organisé par la région de Bruxelles-Capitale, il précise par ailleurs que la région de Bruxelles-Capitale et l'Union européenne ont désigné, aux fins de cette organisation, la SCAB comme consultant. Le point 2.1.3 dispose même que le pouvoir adjudicateur se compose de la région de Bruxelles-Capitale et de l'Union européenne[5]. Il ne fait toutefois aucun doute que le contrat litigieux a été octroyé par la région de Bruxelles-Capitale, et non par l'Union. Le Médiateur estime que les dispositions du règlement du concours évoquées plus haut illustrent le fait que l'Union européenne, à travers ses représentants au sein du jury, a participé de façon effective au choix de l'architecte à qui a été attribué le contrat litigieux. Toutefois, et comme cela a déjà été mentionné, l'Union n'était pas partie au contrat qui a été octroyé au lauréat. Il convient également de noter que les irrégularités qui ont conduit la Commission à conclure à une infraction au droit de l'Union européenne impliquaient des membres du jury qui n'étaient pas des représentants des institutions européennes. Au vu de ce qui précède, rien ne laisse supposer que la Commission elle-même a violé la règlementation de l'Union applicable aux marchés publics dans la présente affaire.

B. Allégation selon laquelle la Commission aurait manqué de garantir que les autorités belges se tiennent strictement à leur engagement d'exécuter son avis motivé du 9 février 2001

Les arguments présentés au Médiateur

38. Dans sa plainte, le plaignant a soutenu que la Commission avait manqué de garantir que les autorités belges se tiennent strictement à leur engagement d'exécuter son avis motivé du 9 février 2001 et de mettre définitivement fin au contrat litigieux.

39. Dans son avis, la Commission a fait savoir que ses services avaient procédé à une enquête en lien avec la nouvelle plainte pour infraction déposée par le plaignant et précisé certains points avec les autorités belges, mais que cette enquête n'avait pas révélé d'éléments permettant de conclure que les autorités belges n'avaient pas respecté leurs engagements.

40. La Commission a indiqué que la première plainte pour infraction, numérotée 98/5025, avait été classée en raison du fait que les autorités belges avaient reconnu les infractions à la directive et pris certains engagements. Elle a souligné que la teneur exacte des engagements pris par les autorités belges était précisée dans leurs lettres du 24 septembre et du 6 novembre 2001. Elle signalait que, dans ces lettres, les autorités belges s'étaient engagées "à mettre un terme au contrat incriminé et à ne passer aucun autre marché dans le cadre de ce contrat. En outre, elles indiquent clairement aux services de la Commission que le contrat incriminé ne prendra définitivement fin qu'après la réception des travaux du parc Léopold par la région de Bruxelles-Capitale assistée de l'architecte." La Commission a ensuite attiré l'attention sur le fait que les autorités belges avaient, en outre, également mentionné le montant maximum des dépenses dans le cadre du contrat, soit 35 120 401 BEF (870 612, 17 EUR) et assuré qu'aucun nouveau marché ne serait attribué au-delà de ce montant.

41. Cependant, il est ensuite apparu que, après que la Commission ait clos la première procédure d'infraction, un avenant au contrat a été conclu, l'avenant n° 6. La Commission a attiré l'attention sur le fait que, conformément à son préambule, l'objet de cet avenant était de préciser le contenu de la mission de l'architecte dans le cadre du réaménagement du parc Léopold, qui était déjà en cours. Selon la Commission, l'avenant détaillait certaines missions de l'architecte ou les élargissait dans certaines limites. La Commission précisait que, selon les autorités belges, cet avenant ne visait pas à étendre le contrat, au mépris de leurs engagements, mais à fixer les droits et obligations des parties en vue de la cessation du contrat.

42. La Commission a ajouté qu'il ressortait des informations fournies par le plaignant et les autorités belges que le montant total dépensé dans le cadre du contrat, soit 35 069 349 BEF, ou 869 347, 58 EUR, était inférieur au maximum mentionné dans l'engagement pris par les autorités belges en 2001. Elle a ensuite attiré l'attention sur le fait que les autorités belges avaient fait valoir que ce montant était également inférieur à celui que la région de Bruxelles-Capitale avait initialement prévu de dépenser dans le cadre du concours architectural, soit 100 000 000 BEF.

43. La Commission a signalé que les autorités belges avaient clairement annoncé qu'elles ne mettraient un terme définitif au contrat qu'après la réception des travaux du parc Léopold par la région de Bruxelles-Capitale assistée de l'architecte. Elle a ajouté que les précisions apportées par l'avenant n° 6 aux missions de l'architecte n'introduisaient pas de modifications substantielles au contrat et que l'extension des missions relatives à la phase n° 8, concernant le parc Léopold, demeuraient dans le champ d'application de ce qui avait déjà été convenu dans les avenants n° 1 et n° 5 à ce contrat, antérieurs aux engagements pris par les autorités belges.

44. La Commission a conclu qu'elle ne pouvait donner raison au plaignant lorsqu'il affirmait que les autorités belges n'avaient pas respecté les engagements pris en 2001. Par conséquent, la Commission n'a pas estimé qu'il était justifié de poursuivre son action. À cet égard, elle a souligné qu'elle disposait du pouvoir discrétionnaire d'ouvrir ou non la procédure prévue à l'ancien article 226 du traité CE (l'actuel article 258 du TFUE).

45. Dans ses observations, le plaignant a insisté sur le fait que le concours en cause enfreignait la directive et était donc illégal. Il a ajouté que si le Médiateur ne se ralliait pas à sa position, il se tournerait vers l'OLAF pour un arbitrage.

46. Le 18 juin et le 6 juillet 2009, les représentants du Médiateur ont procédé à une inspection des dossiers de la DG MARKT concernant les plaintes pour infraction n° 98/5025 et n° 2007/4421. Ces dossiers comprenaient notamment l'avis motivé de la Commission du 9 février 2001, les lettres des autorités belges à la Commission du 12 avril, du 24 septembre et du 6 novembre 2001, les avenants au contrat n° 4, 5 et 6, la lettre de la Commission aux autorités belges du 18 février 2008 et la réponse de celles-ci du 28 mars 2008.

L'analyse du Médiateur

47. Le Médiateur a demandé à la Commission d'émettre un avis sur l'allégation selon laquelle elle aurait manqué de garantir que les autorités belges se tiennent strictement à leur engagement d'exécuter son avis motivé du 9 février 2001 et de mettre définitivement fin au contrat litigieux.

48. Dans son avis, la Commission a donné une description des engagements que lui ont communiqués les autorités belges. Pour le Médiateur, cette description peut être résumée comme suit : la Commission indique que les autorités belges lui ont promis i) qu'il serait mis un terme définitif au contrat concerné ; ii) que ce terme n'adviendrait qu'après la réception des travaux du parc Léopold par la région de Bruxelles-Capitale assistée de l'architecte (c'est-à-dire le lauréat) ; iii) qu'aucun autre marché de services ne serait passé dans le cadre de ce contrat ; et iv) qu'aucun nouveau marché ne serait passé au-delà du montant maximum du contrat en question, soit 870 612, 17 EUR (35 120 401 BEF). L'avis de la Commission laisse planer une incertitude quant au lien entre les engagements iii) et iv) pris par les autorités belges. Le Médiateur comprend toutefois que la Commission suggère que les autorités belges se sont engagées à ne pas demander au lauréat de fournir des services complémentaires "qui ne soient en rapport avec les phases déjà commandées" (lettre du 26 juin 2008) et à ce que, lorsque des services complémentaires seraient nécessaires en lien avec les phases déjà commandées, la rémunération complémentaire pour ces services ne dépasse pas le seuil de 870 612, 17 EUR (35 120 401 BEF).

49. Après avoir inspecté les documents contenus dans le dossier de la Commission, le Médiateur conclut que les engagements pris par les autorités belges pouvaient effectivement raisonnablement être interprétés comme indiqué ci-dessus.

50. Avant d'examiner l'allégation visée au paragraphe 47, le Médiateur estime qu'il convient d'attirer l'attention sur le fait que la façon dont la Commission a présenté les engagements pris par les autorités belges à l'égard du plaignant en 2001 et en 2002 semble diverger par rapport à la description qu'elle en a fourni au cours de la présente enquête. Dans sa lettre du 6 novembre 2001, la Commission a informé le plaignant que les autorités belges avaient "décidé, suite à l'avis motivé de la Commission, de mettre définitivement fin au contrat litigieux et de ne plus donner aucun ordre de service dans le cadre de ce contrat." Dans sa lettre du 21 novembre 2002, la Commission a informé le plaignant de "l'intention des autorités belges de mettre fin au contrat litigieux" et du fait que "les ministres compétents s'étaient engagés à ne pas donner de nouveaux ordres de service dans le cadre du contrat litigieux." Le Médiateur observe toutefois que cette question n'entre pas dans le champ de la présente enquête et qu'il n'y a donc pas lieu de l'examiner ici.

51. Il reste à déterminer si la Commission a fait en sorte que les autorités belges respectent les engagements décrits dans l'avis de la Commission, et se conforment ainsi à l'avis motivé. Le Médiateur doit notamment vérifier si la Commission a avec raison estimé que la conclusion de l'avenant n° 6 était conforme à ces engagements.

52. Le Médiateur conclut que les résultats de l'inspection du dossier de la Commission confirment la position de cette dernière.

53. Au cours de leur inspection, les représentants du Médiateur ont examiné avec une attention particulière le contenu de l'avenant n° 6. Il ressort de cet examen que l'avenant n'a pas introduit de modifications allant à l'encontre des engagements visés au paragraphe 48. Il semble en fait que les nouveaux ordres de service contenus dans l'avenant n° 6 i) concernaient les travaux de réaménagement du parc Léopold, alors en cours, et avaient donc trait aux phases qui avaient déjà été commandées et ii) que le montant maximum du contrat, soit 870 612, 17 EUR, n'a pas été dépassé.

54. Le Médiateur observe que, dans son avis et dans sa lettre au plaignant du 26 juin 2008, la Commission a également avancé que l'avenant n° 6 n'avait pas introduit de modifications "substantielles" au contrat concerné. Toutefois, comme il a été observé plus haut, les explications de la Commission concernant les engagements pris par les autorités belges ne font référence à aucun engagement de ne pas introduire de modifications "substantielles" au contrat. La Médiateur a du mal à comprendre pourquoi la Commission a néanmoins fait référence à ce concept de modifications "substantielles". Le Médiateur pense que ce que la Commission pourrait ici avoir voulu dire est que les ordres complémentaires émis par les autorités belges dans les limites des engagements pris ne représentaient en aucun cas une modification substantielle du contrat tel qu'il existait lorsque ces engagements ont été pris.

55. Compte tenu de ce qui précède, aucun cas de mauvaise administration n'a été établi en ce qui concerne l'allégation examinée ici.

56. Il convient de préciser que le plaignant semble estimer que la Commission a eu tort, dans cette affaire, de classer la plainte pour infraction le 24 avril 2002 sur la base des engagements décrits dans son avis. Cette question a trait aux pouvoirs discrétionnaires que la Commission peut exercer lorsqu'elle considère qu'il y a eu violation du droit de l'Union européenne. En tout état de cause, cette question n'est pas couverte par la présente enquête.

C. La demande d'indemnisation

Les arguments présentés au Médiateur

57. Le plaignant a demandé que la Commission l'indemnise du préjudice qu'il a subi en raison de cette affaire. Il a évalué le préjudice à 295 654 EUR.

58. Dans son avis, la Commission a fait référence à la lettre qu'elle a envoyée le 23 mai 2008 au plaignant concernant sa demande d'indemnisation. Dans cette lettre, qui renvoie à la jurisprudence du Tribunal de première instance de l'Union européenne, la Commission explique que sa décision de ne pas engager une procédure d'infraction au titre de l'ancien article 226 du traité CE (l'actuel article 258 du TFUE) ne peut pas engager la responsabilité non contractuelle de l'Union européenne.

59. Dans ses observations, le plaignant a soutenu qu'il avait fourni un travail et participé au concours en vain et qu'il avait subi un préjudice spécifique. Il a donc maintenu sa demande d'indemnisation.

L'analyse du Médiateur

60. Le Médiateur observe tout d'abord que, sur la base de la jurisprudence pertinente des juridictions de l'Union, l'argument de la Commission relatif à la responsabilité non contractuelle est exact. Le Médiateur est également d'avis que le plaignant n'a, en tout état de cause, pas suffisamment motivé sa demande d'indemnisation à l'encontre de la Commission. Le plaignant n'a notamment pas expliqué pourquoi il avait, en raison des agissements de la Commission, subi un préjudice et comment ce préjudice pouvait justifier une demande d'indemnisation s'élevant à 295 654 EUR.

D. Conclusions

Sur la base de son enquête sur cette plainte, le Médiateur décide de la clore en concluant ce qui suit.

Il n'y a pas eu mauvaise administration de la part de la Commission.

Le plaignant et la Commission seront informés de cette décision.

 

P. Nikiforos DIAMANDOUROS

Fait à Strasbourg le 15 février 2010


[1] Directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services, JO L 209 du 24.7.1992, p. 1.

[2] "Le jury est composé exclusivement de personnes physiques indépendantes des participants au concours. Lorsqu'une qualification professionnelle particulière est exigée pour participer à un concours, au moins un tiers des membres doivent avoir la même qualification ou une qualification équivalente.

Le jury dispose d'une autonomie de décision ou d'avis. Ses décisions ou avis sont pris sur la base de projets qui lui sont présentés de manière anonyme et en se fondant exclusivement sur les critères indiqués dans l'avis au sens de l'article 15 paragraphe 3."

[3] "La présente directive s'applique aux marchés publics de services dont le montant estimé hors TVA égale ou dépasse 200000 écus."

[4] COM(2002) 141final, JO C 244 du 10.10.2002, p. 5.

[5] Point 2.1.1 du règlement du concours : "Pouvoir organisateur.

Afin d'organiser le Concours d'architecture qu'elle met sur pied, la Région de Bruxelles-Capitale et l'Union européenne ont désigné pour consultant la Société Centrale d'Architecture de Belgique....".

Point 2.1.3 : "Type de concours

... Le présent règlement fait foi entre le pouvoir adjudicateur (Région de Bruxelles-Capitale et Union européenne) et les concurrents" (souligné par nous).