- Export to PDF
- Get the short link of this page
- Share this page onTwitterFacebookLinkedin
Décision du Médiateur européen clôturant son enquête sur la plainte 2343/2008/(BU)MF contre la Commission européenne
Decision
Case 2343/2008/(BU)MF - Opened on Friday | 24 October 2008 - Decision on Monday | 08 February 2010
LE CONTEXTE DE LA PLAINTE
1. En vertu de l'article 45 du Statut[1] et des dispositions générales d'exécution de l'article 45 du statut, pour être pris en considération lors de l'exercice de promotion, les fonctionnaires doivent satisfaire à un certain nombre de conditions. Ils doivent notamment obtenir un certain nombre de points de mérite, nombre établi par l'Autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après "AIPN") et annoncé lors de l'exercice de notation précédent, et faire preuve de leur capacité à travailler dans une troisième langue. Ils doivent satisfaire à ces critères au plus tard le 31 décembre de l'année couverte par l'exercice de promotion en question.
2. Le seuil de promotion est fixé chaque année par l'AIPN. Les fonctionnaires qui ont cumulé un nombre de points égal ou supérieur à ce seuil sont proposés pour une promotion.
3. Les points suivants sont pris en compte : i) les points de mérite (PM) et ii) les points de priorité (PPDG).
- les points de mérite sont attribués pour un mérite "normal" et pour une année donnée.
- les points de priorité sont essentiellement de deux types :
a) les points de priorité des directions générales (PPDG), attribués aux fonctionnaires ayant fait preuve de mérites exceptionnels par les directeurs généraux à partir d'un contingent de points disponibles ; et
b) les points de mérite octroyés par les comités de promotion, sur appel, c'est-à-dire lorsque des fonctionnaires déposent un recours auprès de ces comités contre le nombre de PPDG qu'ils ont reçus.
4. Un fonctionnaire ne peut être promu qu'après une comparaison des mérites individuels reconnus à tous les autres fonctionnaires promouvables.
5. Le plaignant, fonctionnaire de grade AD8 à la Commission, pensait être promu en 2007 pour deux raisons.
6. Premièrement, il avait réussi un test de langue EPSO au cours de l'année 2007. Selon lui, il satisfaisait donc à l'un des critères de promotion, à savoir sa capacité à travailler dans une troisième langue.
7. Deuxièmement, dans le cadre de son rapport d'évolution de carrière pour 2006, le plaignant avait obtenu 15 points de mérite. L'AIPN avait fixé le seuil de promotion à 66 points pour l'exercice 2007. En 2007, le plaignant avait accumulé 63 points de mérite.
8. Par conséquent, le plaignant n'a pas été promu en 2007. Il a estimé que cela était la conséquence i) d'une erreur administrative, à la suite de laquelle la DG "Ressources humaines et sécurité" (anciennement DG ADMIN) n'avait pas été informée à temps de son succès au test de langue de l'EPSO ; et ii) du fait qu'il n'avait, à tort, obtenu aucun PPDG en raison de cette erreur. À la suite de son appel, le comité de promotion ne lui a attribué qu'un point de promotion, ce qu'il a également considéré comme une injustice.
9. Concernant le point i) le plaignant a affirmé qu'il s'était inscrit à un test de langue EPSO de sa propre initiative, le 14 février 2007. En juin, il avait passé le test avec succès et, le 2 juillet, EPSO l'avait informé de ses résultats. Or, son nom n'a jamais figuré sur la liste officielle de la Commission recensant les personnes ayant réussi ce test. Par conséquent, la DG Ressources humaines et sécurité, qui attribuait les PPDG, n'avait pas eu connaissance de la réussite du plaignant au test EPSO lorsqu'il a décidé de l'attribution des PPDG.
10. Concernant le point ii), il semble que le plaignant ait considéré que, dans la mesure où il avait réussi l'examen linguistique, il devait recevoir trois PPDG et, en fait, il n'en a reçu aucun.
11. Le 19 juillet 2007, le plaignant a introduit un recours auprès du comité de promotion qui a alors consulté la DG Ressources humaines et sécurité.
12. La DG Ressources humaines et sécurité a alors estimé que "Si sa réussite au test de langue avait été connue et transmise à temps, il n'y a aucun doute que [le plaignant] aurait reçu les points de priorité nécessaires pour permettre sa promotion pendant l'exercice en cours selon ses mérites effectifs." La DG a ajouté qu'elle était "favorable à ce que le comité de promotion puisse corriger, si possible, cette erreur [...] en attribuant des points d'appel à [le plaignant] lui permettant ainsi d'atteindre le seuil indicatif de promotion." Toutefois, et malgré l'avis susmentionné, le comité de promotion a estimé qu'un seul PP pouvait être attribué au plaignant.
13. Le 1er février 2008, le plaignant a saisi l'AIPN d'une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du Statut[2]. Il contestait la décision du comité de promotion de ne lui octroyer qu'un point de priorité. Il fondait sa réclamation sur les commentaires susmentionnés de la DG Ressources humaines et sécurité.
14. Le 29 mai 2008, l'AIPN a rejeté sa réclamation. Elle a affirmé que la preuve de sa capacité à travailler dans une troisième langue ne constituait qu'une seule des conditions nécessaires à la promotion. Ni dans son appel au comité de promotion, ni dans sa réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du Statut, il n'était fait mention de mérites exceptionnels susceptibles de justifier l'attribution de trois PPDG. L'argument du plaignant selon lequel il n'avait pas obtenu les trois PPDG uniquement parce que la DG Ressources humaines et sécurité n'avait pas été avertie de sa participation au test de langue lorsqu'elle avait décidé de l'attribution de ses PPDG n'était donc pas fondé.
15. L'AIPN a indiqué de surcroît que, même si la DG Ressources humaines et sécurité expliquait que l'attribution d'aucun PPDG au plaignant était due à une erreur de sa part, elle n'évoquait aucune raison justifiant l'attribution ultérieure de plus d'un PPDG au plaignant. C'est la raison pour laquelle il est possible d'affirmer que cette erreur a été suffisamment réparée par l'attribution d'un point d'appel par le comité de promotion."
16. N'étant pas satisfait de la réponse de l'AIPN, le plaignant s'est adressé au Médiateur le 4 septembre 2008.
LE SUJET DE L'ENQUÊTE
17. Le plaignant a allégué que la Commission n'avait pas réussi à démontrer qu'il n'y avait aucun lien de causalité entre son refus de le promouvoir et le retard avec lequel elle avait été informée de son succès au test de langue.
18. Le plaignant a demandé que la Commission lui accorde sa promotion rétroactivement pour l'année 2007 et lui verse les salaires correspondants.
L'ENQUÊTE
19. Le 24 octobre 2008, le Médiateur a ouvert une enquête sur l'allégation du plaignant et les demandes susmentionnées.
20. La Commission a communiqué son avis au Médiateur et ce dernier l'a transmis au plaignant en l'invitant à formuler ses observations, ce qu'il a fait le 6 avril 2009.
L'EXAMEN ET LES CONCLUSIONS DU MÉDIATEUR
A. L'allégation selon laquelle la Commission n'a pas réussi à démontrer qu'il n'y avait aucun lien de causalité entre son refus de promouvoir le plaignant et l'information tardive de son succès au test de langue, et les demandes connexes
Les arguments présentés au Médiateur
21. Le plaignant a affirmé que la Commission n'avait pas réussi à démontrer qu'il n'y avait aucun lien de causalité entre son refus de le promouvoir et l'information tardive de son succès au test de langue. Il a affirmé que compte tenu de l'information tardive relative à son succès au test de langue, qui constituait une erreur administrative de la part de la Commission et devait être réparée, il aurait dû se voir attribuer plus d'un point de promotion. Dans ce cas, il aurait atteint le seuil et, par conséquent, aurait été promouvable. Le plaignant a demandé que la Commission lui accorde sa promotion rétroactivement pour l'année 2007 et lui verse les salaires correspondants.
22. Dans son avis, la Commission a maintenu la position adoptée par l'AIPN dans sa réponse du 29 mai 2008 à la réclamation du plaignant au titre de l'article 90, paragraphe 2, du Statut. Il a expliqué que la démonstration de la capacité à travailler dans une troisième langue constituait certes une condition de promotion, mais n'était pas une condition préalable à l'attribution des PPDG. Les fonctionnaires promouvables sont invités à faire la preuve de leur capacité à travailler dans une troisième langue dès que possible. Le test de langue EPSO constituait la "dernière solution" de démontrer cette capacité, puisque d'autres moyens existent en la matière. Elle a rappelé, à cet égard, qu'en ce qui concerne l'exercice de promotion 2007, les fonctionnaires étaient invités à apporter la preuve de leur capacité à travailler dans une troisième langue de l'UE avant la fin de l'année 2007.
23. L'administration n'a pas tenu compte de la capacité à travailler dans une troisième langue lorsqu'elle a décidé de l'attribution des PPDG, ce qu'elle a fait après une comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables. L'attribution des PPDG vise à récompenser les fonctionnaires ayant fait preuve de mérites exceptionnels. L'attribution des PPDG ne dépend pas de critères spécifiques, comme la capacité d'une personne à travailler dans une troisième langue. Dans le cas du plaignant, même si une erreur administrative a été commise parce que la DG Ressources humaine et sécurité n'a pas été informée en temps utile de sa réussite au test de langue EPSO, la décision de ne pas le promouvoir en 2007 n'est pas le fruit de cette erreur.
24. La comparaison des mérites du plaignant avec ceux de ses collègues présentant un profil comparable n'a pas amené le comité de promotion, ni l'AIPN à conclure que le plaignant méritait plus d'un point de promotion. Aucun mérite exceptionnel ne ressort de son appel devant le comité de promotion ou de sa réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du Statut. Dans le respect du principe d'égalité de traitement, le comité de promotion a proposé d'attribuer un point de promotion au plaignant à la suite de son appel, proposition suivie par l'AIPN.
L'analyse du Médiateur
25. De prime abord, les positions diamétralement opposées adoptées par l'administration de la Commission sur le cas du plaignant laissent le Médiateur perplexe. La première position de la Commission est décrite au paragraphe 12 ci-dessus, et sa position ultérieure ressort de la réponse à la réclamation faite par le plaignant au titre de l'article 90, paragraphe et des commentaires transmis au Médiateur. Le Médiateur croit comprendre que c'est cette dernière position qui prévaut.
26. On ne peut contester que le test de langue d'EPSO constitue la preuve de la connaissance d'une troisième langue par le plaignant et que cette connaissance lui était nécessaire pour pouvoir bénéficier d'une promotion. La Commission ne peut raisonnablement affirmer que le plaignant ne possédait pas cette connaissance avant la fin de l'année 2007 puisqu'il a eu les résultats de son test de langue au milieu de cette même année.
27. Dans ses observations, la Commission a cependant expliqué que les promotions dépendaient non seulement de la connaissance démontrée d'une troisième langue mais également d'un nombre total de points de mérite et de points de promotion et de la comparaison qui s'ensuivait des mérites des fonctionnaires promouvables.
28. Le seuil requis dans le cas du plaignant était de 66 points. Le plaignant avait cumulé 63 points de mérite. Il ne pouvait prétendre à aucun PPDG car, selon la Commission, ces points ne dépendaient pas de la connaissance avérée d'une troisième langue mais de mérites exceptionnels - qu'il n'avait pas démontrés. Il a obtenu un point de promotion à la suite de son appel en raison de l'erreur administrative de la Commission. Il avait alors un total de 64 points, inférieur au seuil de promotion établi.
29. Le plaignant a affirmé que, pour corriger son erreur administrative, la Commission devait lui octroyer plus d'un point de promotion. Or, même si le plaignant avait reçu suffisamment de points de promotion pour devenir promouvable, il n'aurait pas été automatiquement promu pour autant. Dans ses observations, la Commission a expliqué qu'elle avait procédé à une évaluation comparative des mérites du plaignant et de ceux de ses collègues promouvables et que le résultat de la comparaison n'avait pas été favorable au plaignant.
30. Dans ce contexte, le Médiateur rappelle que, dans les cas où la décision d'une autorité investie du pouvoir de nomination portant sur le refus de promouvoir un fonctionnaire ou un agent est contestée sur le fond, il a toujours estimé que son enquête devait s'inscrire dans le cadre défini par la jurisprudence communautaire en la matière.
31. Le Médiateur note que la jurisprudence communautaire établit que "les notateurs jouissent du plus large pouvoir d'appréciation dans les jugements portés sur le travail des personnes qu'ils ont la charge de noter et il n'appartient pas au juge d'intervenir dans cette appréciation, sauf en cas d'erreur ou d'excès manifeste...[3]". De plus, "... il appartient aux requérants d'établir l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation"[4] dans l'évaluation de leur travail. Enfin, conformément à la jurisprudence communautaire[5], le Statut ne confère aux fonctionnaires aucun droit à la promotion, même pour ceux qui remplissent toutes les conditions à cet effet.
32. Le Médiateur estime que le plaignant n'a apporté aucune preuve démontrant que son évaluation comparative était entachée d'erreur.
33. Dans ces conditions, et eu égard à la jurisprudence susmentionnée, le Médiateur n'a pas relevé de cas de mauvaise administration concernant l'allégation du plaignant. Les demandes du plaignant ne peuvent donc être soutenues.
C. Les conclusions
Sur la base de son enquête sur cette plainte, le Médiateur classe l'affaire en formulant la conclusion suivante :
Il n'y a pas eu mauvaise administration de la part de la Commission en ce qui concerne l'allégation du plaignant.
Les demandes du plaignant ne peuvent donc être soutenues.
Le plaignant et la Commission seront informés de cette décision.
P. Nikiforos DIAMANDOUROS
Fait à Strasbourg le 8 février 2010
[1] L'article 45 du Statut dispose :
"1. La promotion est attribuée par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination en considération de l'article 6, paragraphe 2. il entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. il se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d'un minimum de deux ans d'ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Aux fins de l'examen comparatif des mérites, l'autorité investie du pouvoir de nomination prend en considération, en particulier, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l'objet, l'utilisation dans l'exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l'article 28, point f), et, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées.
2. Le fonctionnaire est tenu de démontrer, avant sa première promotion après recrutement, sa capacité à travailler dans une troisième langue parmi celles visées à l'article 314 du traité CE. Les institutions arrêtent d'un commun accord les dispositions communes d'exécution du présent paragraphe. Ces dispositions prévoient l'accès à la formation des fonctionnaires dans une troisième langue et fixent les modalités de l'évaluation de la capacité des fonctionnaires à travailler dans une troisième langue, conformément à l'article 7, paragraphe 2, point d), de l'annexe III.
[2] L'autorité investie du pouvoir de nomination a interprété et traité son cas comme étant contre sa décision de ne pas la promouvoir, dans la mesure où les "décisions" du comité de promotion sont en fait des recommandations non contraignantes et ne peuvent faire l'objet d'un appel.
[3] Affaire T-144/03 Schmitt/Commission [2005] RecFP I-A-101 et II-465, point 70.
[4] Affaire T-043/04 Fardoom et Reinard/Commission, [2005] RecFP I-A-329 et II-1465, point 79.
[5] Affaire T-3/92 Edward Patrick Latham/Commission [1994] RecFP I-A-23 et II-23.
- Export to PDF
- Get the short link of this page
- Share this page onTwitterFacebookLinkedin