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Décision du Médiateur européen concernant la plainte 761/2001/OV contre la Commission européenne


Strasbourg, le 8 octobre 2002

Monsieur D.,

Le 3 mai 2001, vous avez déposé une plainte auprès du médiateur belge au nom de "l'Imprimerie Les Éditions européennes S.A." concernant le non-paiement par la Commission de trois factures (98/274, 98/521 et 98/575) pour un montant total de 48.869,85 €. Le 14 mai 2001, le médiateur belge a transmis votre plainte à mon bureau, celle-ci ne relevant pas de sa compétence.

Le 31 mai 2001, j'ai transmis cette plainte au président de la Commission. La Commission a rendu son avis le 5 octobre 2001. Je vous ai envoyé cet avis en vous invitant à formuler des observations, que vous nous avez fait parvenir le 27 novembre 2001.

Le 13 février 2002, j'ai écrit au président de la Commission en proposant une solution à l'amiable pour votre plainte. Une copie de ce courrier vous a été envoyée. Le 14 mai 2002, la Commission a rejeté la proposition de règlement à l'amiable. Je vous ai transmis la lettre de la Commission en vous invitant à formuler des observations, que vous nous avez fait parvenir le 19 juillet 2002.

Aujourd'hui, je vous écris pour vous informer des résultats des enquêtes qui ont été réalisées.

LA PLAINTE

Selon le plaignant, les éléments pertinents étaient les suivants:

Dans le cadre du programme Leonardo da Vinci, le plaignant "Imprimerie Les Éditions européennes S.A." a réalisé des travaux d'impression pour le compte de la Commission (DG XXII). Ceux-ci ont été effectués en 1998 via Agenor, une société qui jouait le rôle de bureau d'assistance technique (BAT) de la Commission. Le plaignant a imprimé deux séries de travaux en anglais, français et allemand et a envoyé ses factures (98/274, 98/521 et 98/575) au bureau d'assistance technique de la Commission le 25 mai, le 30 novembre et le 31 décembre 1998.

Le 11 février 1999, la Commission a cependant unilatéralement mis fin au contrat avec Agenor avec effet à partir du 31 janvier 1999. Cela a provoqué la faillite du bureau d'assistance technique qui ne pouvait dès lors plus payer les factures. Celui-ci avait donc une dette envers le plaignant pour un montant total de 1.971.405 BEF, soit 48.869, 85 €.

Le plaignant a envoyé un courrier recommandé à la Commission le 28 avril 1999, lui demandant de procéder au règlement des factures. Le plaignant a pris note du fait que la DG XXII était favorable à cette requête même si elle était consciente depuis plusieurs mois que de sérieuses irrégularités et fraudes existaient au sein du bureau d'assistance technique.

Dans ce contexte, le plaignant a fait référence aux paragraphes 5.3.1, 5.3.3 et 5.8.5 du rapport du comité des sages (comité d'experts indépendants) créé en 1999 afin d'enquêter sur plusieurs irrégularités. Le plaignant a annexé des parties de ce rapport à sa plainte. Selon ce rapport, la Commission savait depuis 1997 qu'il existait des fraudes et des irrégularités au sein d'Agenor, mais n'a pris aucune mesure.

La Commission a finalement mis fin au contrat, ce qui a provoqué la faillite du bureau d'assistance technique, et donc le non-règlement des factures impayées. La Commission n'a pas répondu à la lettre du plaignant datée du 28 avril 1999. Au téléphone, la Commission a répondu que le plaignant devait d'abord attendre que la procédure de faillite soit achevée. Toutefois, le liquidateur a informé le plaignant que la procédure de faillite n'était pas prête d'être clôturée.

Le 3 mai 2001, le plaignant a donc écrit au médiateur affirmant que la Commission était responsable du non-paiement par son bureau d'assistance technique "Agenor" de trois factures pour un montant total de 48.869,85 € car 1) les publications concernées ont été produites pour le compte de la Commission, 2) la Commission a approuvé les offres avant que le plaignant ne réalise les travaux et 3) la Commission n'a pris aucune mesure alors qu'elle était au courant depuis 1997 d'irrégularités et de fraudes au sein d'Agenor.

L'ENQUÊTE

L'avis de la Commission

Dans son avis, la Commission a souligné que dans le cadre de l'assistance qu'elle fournissait à la Commission pour la gestion du programme Leonardo da Vinci, la société Agenor avait commandé des travaux d'impression au plaignant. À la suite de la faillite d'Agenor, le plaignant a rempli une déclaration de recouvrement. Cependant, selon les informations fournies par le liquidateur, la faillite ne serait pas clôturée rapidement, et par conséquent, trois factures du plaignant sont restées impayées.

La Commission n'a aucune relation contractuelle avec le plaignant et ne peut donc être tenue pour responsable de la situation dans laquelle celui-ci se trouve, résultat de ses relations commerciales avec la société faillie.

Le plaignant avance trois raisons sur la base desquelles la Commission devrait être tenue pour responsable du non-paiement des trois factures. En la matière, la Commission exprime les remarques suivantes:

Agenor a fourni une assistance technique à la Commission dans le cadre du programme Leonardo da Vinci. Afin de mettre en œuvre le programme de travail qui était partie intégrante de son contrat avec la Commission, Agenor a conclu des contrats (y compris des contrats d'emploi). Une partie des travaux qu'Agenor a délégués au plaignant a été intégrée dans ce programme de travail avec toutes les autres tâches dont était chargé Agenor dans le cadre de son contrat avec la Commission. La délégation de certaines tâches a été réalisée au travers des contrats entre Agenor et ses fournisseurs.

Le fait qu'Agenor et le plaignant étaient les seules parties du contrat n'est pas remis en question par le fait que la Commission aurait approuvé les spécifications des travaux sous-traités par Agenor. Cette approbation doit être considérée dans le strict cadre de la relation entre la Commission et Agenor. La Commission a mis sur pied un système de contrôles préalables des coûts engagés par Agenor. Cela explique pourquoi une série de spécifications ont préalablement été soumises à l'approbation de la Commission, exclusivement pour des raisons de contrôle financier dans le cadre de l'exécution du programme Leonardo da Vinci.

L'analyse des différents rapports d'audit au sein des services de la Commission ne l'a pas amené à envisager de mettre fin à la relation contractuelle avec Agenor. En ce qui concerne la référence aux activités frauduleuses, ce n'est qu'au mois de février 1999 qu'il a été établi que certaines irrégularités pouvaient éventuellement relever du pénal. Dans l'intérêt du programme et de ses bénéficiaires, la Commission a considéré qu'il était préférable de maintenir ses relations contractuelles avec Agenor, avec cependant des conditions supplémentaires afin d'éviter toute répétition des irrégularités. Le renouvellement du contrat à partir du 1 février 1999 présupposait une restructuration convaincante du bureau d'assistance technique, dont les conditions avaient été communiquées à Agenor. Étant donné que les modifications nécessaires n'avaient pas été mises en œuvre, la Commission en a conclu au mois de février 1999 qu'elle ne pouvait pas poursuivre sa relation contractuelle avec Agenor et a annoncé qu'elle ne renouvellerait pas son contrat qui avait expiré le 31 janvier.

Les observations du plaignant

Le plaignant a maintenu que la responsabilité de la Commission pour le non-paiement des factures était directement engagée. Il a de nouveau fait référence au rapport du comité des sages (comité d'experts indépendants) qu'il avait mentionné dans sa plainte initiale.

En ce qui concerne l'argument de la Commission selon lequel elle n'avait aucune relation contractuelle avec le plaignant et que, dès lors, elle ne pouvait pas être tenue pour responsable du paiement des factures, le plaignant a déclaré que, dans son rapport, le comité des sages avait souligné qu'en principe, la Commission ne devrait pas déléguer à des firmes privées la gestion de programmes communautaires ayant des objectifs d'intérêt général. La Commission elle-même, et non Agenor, aurait donc dû établir une relation contractuelle avec le plaignant.

Le plaignant a rejeté l'argument de la Commission selon lequel les publications n'auraient pas été réalisées pour le compte de la Commission, mais pour celui d'Agenor. Les publications qui font l'objet des factures impayées ont été approuvées par la Commission, elles ont été réalisées pour son compte et ont été livrées directement à la DG XXII et à l'office des publications officielles des Communautés européennes. En outre, les commandes passées au plaignant ont été faites sur du papier à en-tête avec la mention programme Leonardo da Vinci, l'expéditeur étant le "bureau d'assistance technique de la Commission pour le programme Leonardo da Vinci". Il semble donc extrêmement improbable que la Commission n'était pas responsable, ou au moins substantiellement concernée, des travaux d'impression dans le cadre du programme Leonardo da Vinci.

Le plaignant a également indiqué que le fait qu'Agenor devait systématiquement obtenir l'approbation préalable des services de la Commission avant d'engager des frais dépassant un certain montant ainsi que le fait que la Commission et la Cour des comptes avaient accès à tous les documents détenus par Agenor ne font que renforcer l'impression que la Commission faisait plus que simplement superviser les activités de son bureau d'assistance technique.

Le plaignant a fait référence au principe de la confiance légitime: la Commission, en maintenant sa relation avec Agenor, a créé une confiance légitime selon laquelle Agenor possédait les capacités d'organisation et la rigueur nécessaires pour assumer ses obligations envers les tierces parties. Étant donné les informations dont disposait la Commission, celle-ci n'aurait pas dû susciter cette confiance.

En ce qui concerne l'argument de la Commission selon lequel elle a pris suffisamment de mesures pour mettre fin à sa relation contractuelle avec Agenor à la suite des nombreuses irrégularités, le plaignant fait observer que le contrat avec Agenor aurait pu être résilié bien avant février 1999. Un premier rapport d'audit réalisé par la DG XXII entre le 1 juin 1996 et le 31 mai 1997 soulignait déjà plusieurs anomalies dans la gestion du programme Leonardo da Vinci. Cela a été confirmé par un second examen en juillet 1997. En outre, un audit officiel au mois de février 1998, réalisé conjointement par la DG XX et l'UCLAF, sur la mauvaise gestion du bureau d'assistance technique, a confirmé une fois encore les allégations de fraude et de corruption révélées plus tôt. Cependant, malgré les remarques faites dans les différents rapports d'audit, les services de la Commission n'ont pris aucune mesure visant à régler ce problème. Si la Commission l'avait fait en 1997, lorsque cela était nécessaire, le bureau d'assistance technique n'aurait pas pu conclure avec le plaignant le contrat à l'origine des factures impayées. Il existe donc un lien de causalité direct entre le non-paiement des factures du plaignant et le retard qu'a pris la Commission à réagir aux fraudes et irrégularités dans la gestion d'Agenor.

Informations supplémentaires fournies par le plaignant

Le 21 janvier 2002, le bureau du médiateur a contacté le plaignant afin de s'informer de la situation de la procédure de liquidation d'Agenor. Le plaignant a déclaré que l'affaire était encore entre les mains du liquidateur et que l'ensemble de la procédure prendrait probablement plusieurs années pour être achevée. Le plaignant a confirmé qu'il avait rempli une déclaration de recouvrement avec le liquidateur.

LES EFFORTS DU MÉDIATEUR POUR PARVENIR À UNE SOLUTION AMIABLE

Après avoir soigneusement pris en considération les avis et observations, le médiateur a considéré qu'il pouvait s'agir d'un exemple de mauvaise administration de la part de la Commission. Conformément à l'article 3(5) du statut(1), il a donc écrit au président de la Commission le 13 février 2002 afin de proposer une solution à l'amiable basée sur l'analyse suivante du litige entre le plaignant et la Commission:

1.1 Le plaignant affirme que la Commission est responsable du non-paiement par son bureau d'assistance technique "Agenor" de trois factures pour un montant total de 48.869,85 € car 1) les publications concernées ont été réalisées pour le compte de la Commission, 2) la Commission a approuvé les offres avant que le plaignant ne réalise les travaux et 3) la Commission n'a pris aucune mesure alors qu'elle était au courant depuis 1997 d'irrégularités et de fraudes au sein d'Agenor. La Commission, en revanche, a déclaré qu'elle n'avait aucune relation contractuelle avec le plaignant et qu'elle ne pouvait dès lors pas être tenue pour responsable de la situation dans laquelle le plaignant se trouve, résultat de ses relations commerciales avec la société faillie.

1.2 Le médiateur remarque que, dans son premier rapport relatif aux allégations de fraude, mauvaise gestion et népotisme au sein de la Commission européenne, le comité d'experts indépendants(2) ("comité des sages") a soigneusement analysé les responsabilités de la Commission concernant Agenor dans le cadre du programme Leonardo da Vinci.

1.3 En ce qui concerne la chronologie de l'affaire, le rapport du comité établit que "la DG XXII, qui est responsable du programme, a trouvé des indices d'irrégularités dès 1994, lorsqu'elle a réalisé un audit interne de la mise en œuvre par Agenor d'un programme prédécesseur (…). Elle aurait dû agir en conséquence, si ce n'était dans le choix d'Agenor en tant que BAT pour Leonardo, alors au moins dans la supervision de ses activités, une fois Agenor choisi. Comme le montre le propre rapport d'audit de la DG XXII, de nombreuses irrégularités et pratiques frauduleuses ont été détectées en 1997 (…). Dans le projet de rapport d'audit interne du 20 juillet 1998 de la DG XX, les allégations de nombreuses fraudes et irrégularités étaient confirmées. Il révélait d'importantes déficiences dans le contrôle du BAT Leonardo/Agenor par la DG XXII et est parvenu à la conclusion qu'il n'était pas toujours évident de savoir qui contrôlait qui, la DG XXII ou le BAT. Ce n'est qu'au début du mois de novembre 1998 que des mesures ont été prises dans le rapport d'audit final, soumis officiellement à la DG XXII et ensuite aux autres commissaires" (points 5.8.4 à 5.8.6).

1.4 La réclamation du plaignant doit être analysée dans le cadre du rapport du comité des experts indépendants. Au moment où le plaignant a été choisi par Agenor pour réaliser les publications, à savoir le 20 mai 1998, la Commission était déjà au courant depuis bien longtemps des fraudes et des irrégularités au sein du bureau d'assistance technique Agenor, mais n'avait pris aucune mesure.

1.5 Dans le cas présent de commande de publications auprès du plaignant et de la livraison ultérieure de celles-ci, le médiateur remarque que le bureau d'assistance technique de la Commission agissait intégralement pour le compte de la Commission, qui était à l'origine de la commande et le destinataire de facto des publications. En témoignent les éléments suivants:

1.6 C'est pour le compte de la DG XXII que les publications avaient été commandées. C'est la Commission qui a approuvé la version finale des publications. Cela ressort de la note du 27 novembre 1998 de l'office des publications officielles des Communautés européennes à la DG XXII/C/3 délivrant le "bon pour impression".

1.7 Les publications ont été livrées à la Commission, certaines directement à la DG XXII, d'autres à l'office des publications officielles. Cela est explicitement mentionné dans une commande du 23 décembre 1998 d'Agenor au plaignant, spécifiant que l'adresse de livraison était le "Centre de diffusion de l'OPOCE, (…) Gasperich, L- 1225 Luxembourg". La Commission a donc reçu les publications sans avoir dû en supporter le coût.

1.8 Toutes les lettres envoyées par Agenor au plaignant l'ont été sur du papier à en-tête mentionnant "Programme Leonardo da Vinci, Bureau d'assistance technique à la Commission européenne pour le programme Leonardo da Vinci".

1.9 Dans ces circonstances, le fait que la Commission nie toute responsabilité pour le non-paiement des trois factures du plaignant ne semble pas être raisonnable. La conclusion provisoire du médiateur est que cette affaire pourrait constituer un exemple de mauvaise administration.

La proposition de solution à l'amiable

Le médiateur, à la lumière des considérations qui précèdent, a proposé une solution à l'amiable entre le plaignant et la Commission, à savoir l'acceptation de la part de la Commission de sa responsabilité dans le non-paiement des trois factures pour un montant total de 48.869,85 € et donc, de les régler. Il a été demandé à la Commission de répondre avant le 30 avril 2002.

La réponse de la Commission

La Commission a maintenu qu'elle ne pouvait pas être tenue pour responsable du non-paiement des factures générées par la relation contractuelle entre le plaignant et la société faillie Agenor. Conformément au droit de la faillite, la demande du plaignant devrait être intégrée à celles de l'ensemble des créanciers et être réglée dans le cadre de la liquidation de la société faillie. Le plaignant a d'ailleurs remis une demande de recouvrement à la curatelle.

Le fait que certains aspects du contrat sur lequel le médiateur a attiré l'attention (les commandes concernaient des publications demandées par la Commission, les "bons pour impression" ont été signé par la Commission, les publications ont été livrées à la Commission) n'invalide en rien le fait que la Commission n'était pas une partie du contrat.

De ce point de vue, le plaignant se trouve dans la même situation que tous les créanciers d'Agenor. La Commission ne peut pas adopter une position qui enfreigne le droit de la faillite et l'égalité entre les créanciers. La Commission ne peut dès lors pas répondre favorablement à la proposition de solution à l'amiable du médiateur.

Les observations du plaignant

Le plaignant a souligné qu'il ne pouvait pas accepter le raisonnement de la Commission qui consistait à rejeter complètement sa responsabilité dans le paiement des factures, considérant spécialement que les lettres envoyées l'étaient sur du papier à en-tête mentionnant le BAT de la Commission, que les publications avaient été approuvées par la Commission, réalisées pour le compte de la Commission et livrées directement aux services de celle-ci.

Le plaignant fait en outre remarquer qu'il avait déposé une plainte contre la Commission pour non-respect du code de bonne conduite administrative de la Commission pour ses relations avec le public, et que, si aucune solution à l'amiable ne pouvait être trouvée, il n'aurait d'autre possibilité que de poursuivre la Commission devant les tribunaux.

LA DÉCISION

1 La responsabilité présumée de la Commission pour le non-règlement des factures impayées par son bureau d'assistance technique

1.1 Le plaignant affirme que la Commission est responsable du non-paiement par son bureau d'assistance technique "Agenor" de trois factures pour un montant total de 48.869,85 € car 1) les publications concernées ont été produites pour le compte de la Commission, 2) la Commission a approuvé les offres avant que le plaignant ne réalise les travaux et 3) la Commission n'a pris aucune mesure alors qu'elle était au courant depuis 1997 d'irrégularités et de fraudes au sein d'Agenor.

1.2 La Commission a déclaré qu'elle n'avait aucune relation contractuelle avec le plaignant et qu'elle ne pouvait dès lors pas être tenue pour responsable de la situation dans laquelle le plaignant se trouve, résultat de ses relations commerciales avec la société faillie. La Commission a également rejeté la proposition du médiateur de solution à l'amiable de cette affaire arguant qu'elle ne pouvait être tenue responsable du paiement de factures générées par une relation contractuelle entre le plaignant et son bureau d'assistance technique. La Commission a ajouté que la réclamation du plaignant pourrait être réglée dans le cadre de la liquidation de la société faillie.

1.3 Le médiateur souligne qu'Agenor a agi pour le compte de la Commission en administrant un programme financé par la Communauté. La Commission reste responsable de la qualité de l'administration des organisations gérant des programmes en son nom (bureau d'assistance technique - BAT). En outre, les principes de bonne administration exigent que la Commission prennent les mesures adéquates afin de vérifier la fiabilité et le fonctionnement des BAT. Cette dernière exigence est particulièrement importante du point de vue des tierces parties fournissant des biens et des services à la Commission. De telles tierces parties peuvent raisonnablement supposer que, en passant des contrats nécessaires à la gestion d'un programme financé par la communauté, le BAT agit pour le compte de la Commission et bénéficie de sa totale confiance.

1.4 Dans le cas présent, il apparaît dans le rapport du comité des sages du 15 mars 1999 que, dès 1994, la commission était au courant d'irrégularités au sein de son bureau d'assistance technique Agenor. D'autres irrégularités ainsi que des pratiques frauduleuses ont été découvertes en 1997 et confirmées dans un rapport d'audit de juillet 1998. Cependant, c'est seulement en février 1999 que la Commission a décidé de mettre fin à son contrat avec Agenor. Entre-temps – à savoir au mois de mai 1998 – le plaignant avait déjà été sélectionné par Agenor pour procéder à l'impression des publications pour la Commission. À l'époque, le plaignant n'était pas au courant de ces irrégularités et fraudes et a agi comme si Agenor était encore un partenaire contractuel fiable jouissant de la totale confiance de la Commission.

1.5 À la lumière de ce qui précède, le médiateur considère que la Commission semble avoir tardé de manière injustifiée à remédier aux problèmes identifiés des irrégularités et des pratiques frauduleuses au sein de son BAT, Agenor. La conséquence de ce retard a été que la Commission a continué à effectivement présenter Agenor à des tierces parties en tant qu'interlocuteur adéquat, pouvant agir au nom de la Commission dans la gestion d'un programme financé par la Communauté alors que la Commission savait que ce n'était pas le cas. Si la Commission avait agi rapidement afin de mettre fin au contrat avec Agenor, le plaignant n'aurait jamais signé le contrat à l'origine des factures impayées. C'est pourquoi, la situation dans laquelle se trouve le plaignant aujourd'hui est une conséquence du manquement de la Commission à agir promptement afin de prendre les mesures appropriées pour régler les problèmes d'irrégularités et de pratiques frauduleuses dont elle connaissait l'existence au sein d'Agenor.

1.6 Le médiateur considère que la Commission était de facto le client du plaignant. Les faits suivants en témoignent: c'est pour le compte de la Commission, à savoir la DG XXII, que les publications ont été commandées. C'est la Commission qui a approuvé la version finale des publications. Cela s'est fait dans une note du 27 novembre 1998 de l'office des publications officielles à la DG XXII/C/3 délivrant le "bon pour impression". À ce moment, les irrégularités et les fraudes au sein d'Agenor avaient déjà fait l'objet de rapports à plusieurs reprises au sein de la Commission. En outre, les publications ont été livrées directement à la Commission, l'adresse de livraison étant le "Centre de diffusion de l'OPOCE".

1.7 Enfin, le médiateur souligne l'élément important suivant: la Commission semble avoir reçu les publications et donc en avoir bénéficié sans avoir à en supporter les coûts. La Commission ne contredit pas ce fait dans son avis sur la proposition de solution à l'amiable. Cela donne l'impression qu'il y a eu un enrichissement sans cause de la Commission, ce qui serait contraire aux principes généraux du droit communautaire(3).

1.8 Considérant que la situation dans laquelle se trouve aujourd'hui le plaignant est une conséquence du manquement de la Commission à avoir agi rapidement pour prendre les mesures appropriées afin de régler les irrégularités et les pratiques frauduleuses dont elle connaissait l'existence au sein d'Agenor, que la Commission était de facto le client du plaignant, et qu'il pourrait y avoir un enrichissement sans cause de la Commission, contraire aux principes du droit communautaire, le médiateur pense que le refus de la Commission d'admettre sa responsabilité pour le paiement des factures impayées du plaignant constitue un exemple de mauvaise administration.

2 Conclusion

Il convient, à la lumière des enquêtes du médiateur, de formuler les critiques suivantes:

Les principes de bonne administration exigent de la Commission qu’elle prenne les mesures adéquates afin de vérifier la fiabilité et le fonctionnement de ses bureaux d'assistance technique. Cette dernière exigence est particulièrement importante du point de vue des tierces parties fournissant des biens et des services à la Commission. De telles tierces parties peuvent raisonnablement supposer que, en signant des contrats nécessaires pour la gestion d'un programme financé par la Communauté, le BAT agit au nom de la Commission et bénéficie de sa totale confiance.

Considérant que la situation dans laquelle se trouve aujourd'hui le plaignant est une conséquence du manquement de la Commission à avoir agi rapidement pour prendre les mesures appropriées afin de régler les irrégularités et les pratiques frauduleuses dont elle connaissait l'existence au sein d'Agenor, que la Commission était de facto le client du plaignant, et qu'il pourrait y avoir un enrichissement sans cause de la Commission, contraire aux principes du droit communautaire, le médiateur pense que le refus de la Commission d'admettre sa responsabilité pour le paiement des factures impayées du plaignant constitue un exemple de mauvaise administration.

Dans ses observations, le plaignant a déclaré que si aucune solution à l'amiable ne pouvait être trouvée, il n'aurait d'autre choix que d'amener l'affaire devant les tribunaux. Étant donné que la Commission a rejeté une solution à l'amiable, le médiateur clôt donc l'affaire par les critiques ci-dessus.

Le président de la Commission sera également informé de cette décision.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments distingués.

 

Jacob SÖDERMAN


(1) "Dans la mesure du possible, le médiateur recherche avec l'institution ou l'organe concerné une solution de nature à éliminer les cas de mauvaise administration et à donner satisfaction à la plainte".

(2) Comités des experts indépendants, premier rapport sur les allégations de fraude, mauvaise gestion et népotisme à la Commission européenne, 15 mars 1999.

(3) Sur le principe d'interdiction de l'enrichissement sans cause, cf. Affaire T-171/99, Corus UK Ltd v Commission, ECR 2001, II-02967, par. 55; Affaire C-259/87, Greece v Commission, ECR 1990, I - 2845.