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Décision du Médiateur européen concernant la plainte 94/98/(XD)ADB contre la Commission européenne
Decision
Case 94/98/ADB - Opened on Tuesday | 05 May 1998 - Decision on Thursday | 20 May 1999
Strasbourg, 20 mai 1999
Monsieur,
Le 24 mars 1998, vous m'avez adressé, en ma qualité de Médiateur européen, une plainte dirigée contre la Commission européenne pour non-paiement du salaire et des indemnités qui vous seraient encore dus pour votre dernier mois de travail au titre du projet de réhabilitation d'un hôpital en Mauritanie, projet financé par le Fonds européen de développement.
J'ai transmis votre plainte au Président de la Commission le 5 mai 1998. Vous avez complété votre dossier le 11 mai 1998; mes services ont communiqué ces renseignements complémentaires à la Commission le 26 mai 1998. La Commission m'a envoyé son avis le 12 août 1998, et je vous en ai donné communication en vous invitant à formuler toutes observations que vous jugeriez utiles. Vos observations sur l'avis de la Commission me sont parvenues le 2 octobre 1998.
La Commission m'a fourni quelques précisions le 23 décembre 1998. Je vous les ai transmises le 8 janvier 1999 en vous priant de me faire connaître vos éventuelles observations complémentaires avant la fin du mois de février. Vous ne m'avez pas présenté d'autres observations.
Je vous fais part à présent des résultats de mon enquête.
LA PLAINTE
Les faits pertinents, tels qu'ils sont allégués par le plaignant, sont récapitulés ci-après.
En 1996, le plaignant a travaillé comme conducteur de travaux en Mauritanie, dans le cadre du projet de réhabilitation de l'hôpital national de Nouakchott, projet entièrement financé par le Fonds européen de développement (FED). Il était au service de l'entreprise locale adjudicataire du marché, la société E.G.B.T.P. Cette dernière ne lui aurait versé ni la rémunération à laquelle il avait droit pour son dernier mois de travail (avril 1996) ni ses indemnités pour frais de logement et frais de voyage.
Le plaignant fonde sa réclamation sur l'article 11 du cahier général des charges relatif aux marchés de travaux financés par le FED (ci-après "article 11"). Selon lui, ces dispositions prévoient que, en cas de non-paiement des salaires par l'entreprise adjudicataire (le "titulaire", dans la terminologie de la réglementation), l'Union européenne peut, à la demande du maître d'ouvrage, régler directement les salaires dus. Or, les démarches faites à ce titre par le plaignant auprès de la Commission seraient restées vaines. La Commission ne se serait pas conformée aux prescriptions de l'article 11.
L'ENQUÊTE
L'avis de la Commission
Les commentaires de la Commission sont récapitulés ci-après.
L'article 11 prévoit que, en cas de retard dans le paiement des salaires dus aux employés du titulaire (en l'espèce, la société E.G.B.T.P.), le maître d'ouvrage (en l'espèce, l'administration mauritanienne) peut payer directement ces salaires et faire venir le montant correspondant en déduction des sommes dues au titulaire. Dans cette hypothèse, il incombe à l'administration mauritanienne de demander à la Commission, qui est le bailleur de fonds, d'effectuer directement le paiement aux employés concernés. Encore faut-il que ces employés (en l'occurrence, le plaignant) aient été engagés par la société E.G.B.T.P. pour travailler dans le cadre d'un projet financé par le FED.
Suite à la requête du plaignant, la Commission, par l'intermédiaire de sa délégation en Mauritanie, a pris contact avec la société E.G.B.T.P. pour obtenir de plus amples informations sur cette affaire. Par lettre du 11 mars 1998, la société a indiqué que le contrat de travail conclu avec le plaignant ne relevait pas d'un projet financé par le FED.
Dans ces conditions, la Commission a considéré qu'il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la requête du plaignant, ce dont elle l'a informé par lettre du 24 avril 1998. Le 11 mai 1998, le plaignant faisait savoir à la Commission que l'affirmation de la société E.G.B.T.P. était inexacte, et il soumettait à l'appui de ses dires une attestation émise par son employeur, le directeur de ladite société.
Au vu de cette attestation, la Commission a pris contact avec l'administration mauritanienne par l'intermédiaire de sa délégation en Mauritanie. Et l'institution de répéter que les autorités nationales sont seules habilitées, en tant que maître d'ouvrage, à mettre en branle la procédure prévue à l'article 11.
Les observations du plaignant
Le Médiateur a transmis l'avis de la Commission au plaignant, en l'invitant à formuler ses observations. Dans sa réponse du 2 octobre 1998, l'intéressé maintient sa plainte et fournit une liste non exhaustive de personnes susceptibles de témoigner de sa présence ininterrompue pendant les vingt-huit mois qu'ont duré les travaux.
L'ENQUÊTE COMPLÉMENTAIRE
Le second avis de la Commission
Le Médiateur a demandé à la Commission de l'informer du résultat des contacts de sa délégation avec l'administration mauritanienne évoqués dans son premier avis.
Dans son second avis, la Commission indique que les autorités mauritaniennes ont fait savoir à sa délégation que le marché de travaux pertinent avait été réceptionné définitivement le 13 janvier 1997; par conséquent, le maître d'ouvrage n'était plus habilité, à partir de cette date, à agir sur la base de l'article 11.
La Commission répète qu'elle n'aurait pu intervenir dans le cadre de l'article 11 qu'à la demande du maître d'ouvrage, c'est-à-dire de l'administration mauritanienne. Elle souligne, au passage, que le litige opposant le plaignant à la société E.G.B.T.P. semble avoir pour origine le fait que la société avait versé indûment des émoluments à l'épouse du plaignant et qu'elle tentait de les recouvrer sur les sommes dues à ce dernier. Il est clair, de l'avis de la Commission, que ce litige n'entre pas dans le champ d'application de l'article 11, mais est de la compétence des tribunaux.
Les observations complémentaires du plaignant
Le Médiateur a transmis le second avis de la Commission au plaignant. Celui-ci n'a pas présenté d'observations complémentaires.
LA DÉCISION
1 Le fait que la Commission n'ait pas agi à la place de l'adjudicataire du marché
1.1. Le plaignant, soutenant qu'il n'a pas été rémunéré pour le dernier mois de travail qu'il a effectué au titre d'un projet financé par le Fonds européen de développement (FED), prétend que la Commission aurait dû intervenir conformément à l'article 11 du cahier général des charges relatif aux marchés de travaux financés par le FED(1) (ci-après "cahier des charges") et lui payer les sommes dues par la société E.G.B.T.P., adjudicataire du marché. La Commission fait valoir qu'elle aurait seulement pu agir à la demande de l'administration mauritanienne et que le litige se situe en dehors du champ d'application des dispositions du cahier des charges.
1.2. L'article 11 du cahier des charges s'énonce comme suit:
- "En cas de retard dans le paiement des salaires et traitements dus aux employés du titulaire ainsi que des indemnités et cotisations prévues par le droit de l'État où se déroulent les travaux, le maître d'ouvrage peut notifier au titulaire son intention de payer directement les salaires, traitements, indemnités et cotisations dans un délai de quinze jours. Si le titulaire conteste le fait que de tels paiements sont dus, il dispose de ce délai de quinze jours pour adresser une réclamation motivée au maître d'ouvrage. Si le maître d'ouvrage estime, après avoir examiné cette réclamation, que le paiement des salaires et traitements doit être effectué, il peut payer les salaires, traitements, indemnités et cotisations sur les sommes dues au titulaire. [...]"
1.3 Il ressort des pièces présentées au Médiateur par le plaignant que ce dernier a travaillé pour un projet financé par le FED dans le cadre du cahier des charges précité
1.4 Il ressort du dossier présenté par le plaignant que la Commission, par l'intermédiaire de sa représentation à Paris, a pris contact avec les autorités mauritaniennes le 13 décembre 1996, faisant valoir que l'administration maître d'ouvrage du projet pouvait régler le problème du plaignant en recourant à la procédure prévue à l'article 11 du cahier des charges.
1.5 En fait, le maître d'ouvrage n'a pas appliqué ladite procédure, et il n'a pas demandé à la Commission, en tant que bailleur de fonds du projet, de payer directement le plaignant. Le projet est définitivement clos, le maître d'ouvrage ayant réceptionné le marché des travaux le 13 janvier 1997, et une telle solution n'est donc plus possible.
1.6 La Commission a entrepris des démarches en faveur du plaignant, mais elle n'était pas habilitée à appliquer la procédure prévue à l'article 11 sans être sollicitée à cet effet par l'administration mauritanienne. Il n'apparaît pas que le plaignant ait demandé l'ouverture de cette procédure aux autorités compétentes. Aussi le Médiateur ne constate-t-il pas d'élément constitutif de mauvaise administration.
2 Conclusion
Son enquête l'amenant à conclure qu'il n'y a pas eu en l'occurrence mauvaise administration de la part de la Commission, le Médiateur classe l'affaire.
Le Président de la Commission sera informé de la présente décision.
Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de ma considération distinguée.
Jacob SÖDERMAN
(1) Annexe II à la décision 92/97/CEE du Conseil du 16 décembre 1991, JO L 40 du 15.2.1992, p. 23.
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