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Décision du Médiateur européen concernant la plainte 1367/2007/ELB contre la Commission européenne


Strasbourg, le 20 juillet 2008

Monsieur,

Le 11 mai 2007, au nom d'une association dénommée «Association Groupe L'image», vous avez introduit auprès du Médiateur européen une plainte contre la Commission européenne concernant le projet «07A005670/e-learning Imageduc 2002-5775».

Le 4 juillet 2007, j'ai transmis la plainte au Président de la Commission. La Commission a envoyé son avis le 15 octobre 2007. Je vous l'ai communiqué avec une invitation à soumettre des observations, que vous m'avez envoyées le 13 décembre 2007.

Les 8 et 10 décembre 2007, vous m'avez écrit pour me demander de plus amples informations sur la procédure en cours. Je vous ai répondu le 21 janvier 2008. Vous avez envoyé des documents complémentaires concernant votre plainte le 25 février 2008 et le 16 avril 2008.

Je vous écris aujourd'hui pour vous informer des résultats de l'enquête réalisée.


LA PLAINTE

Les faits, tels que présentés par le plaignant, peuvent être résumés de la manière suivante.

La plainte a été déposée par le Président d'une association dénommée «Association Groupe L'image». Le 20 décembre 2002, le Président, ci-après le plaignant, a signé une convention de subvention avec la Commission en vue de mener à bien un projet intitulé «Imageduc». Le projet Imageduc avait pour objectif de créer un site Internet pédagogique et d'organiser une réunion internationale sur ce même thème.

La Commission a effectué un premier versement, correspondant à 80 % du montant de la subvention. Une fois le projet terminé, elle a réalisé une analyse financière et a constaté que certaines dépenses étaient «inéligibles». Par conséquent, la Commission a décidé de ne verser qu'une partie du solde de la subvention, à savoir 14 339,14 EUR, au lieu de 60 631 EUR, et a conservé la somme de 46 291,86 EUR. Le projet a ensuite fait l'objet d'un audit complet. L'audit a conclu que le plaignant devait rembourser un trop-perçu de 88 319,15 EUR.

Le 5 avril 2006, le plaignant a écrit à la Commission pour lui faire part de ses doléances. En l'absence de réponse à sa lettre, il a contacté la Commission par courrier électronique le 23 novembre 2006 et lui a envoyé un courrier par la poste le 19 mars 2007.

Le 4 avril 2007, la Commission a répondu au plaignant que, conformément à l'article 6 de la convention signée entre l'association et la Commission, le bénéficiaire de la subvention devait produire un rapport deux mois après la fin de la période d'éligibilité du projet. Le rapport final a été rejeté par la Commission pour non-respect du modèle contractuel. Le 14 juillet 2004, la Commission a fait part de sa préoccupation quant aux résultats obtenus. Un délai supplémentaire a été accordé au plaignant pour compléter le site du projet. Le délai passé, la Commission a estimé que le projet avait atteint les objectifs techniques. Cependant, l'analyse financière a révélé des défaillances dans les documents comptables. La Commission a fait observer que le plaignant avait demandé le remboursement des apports «en nature», qui n'étaient pas des coûts «éligibles». Les apports «en nature» comprenaient l'utilisation d'images, de bâtiments et de personnel. De ce fait, le plaignant a été informé qu'il devait rembourser un montant de 88 319,15 EUR.

Le plaignant a jugé qu'il était inacceptable qu'un projet, qui avait été approuvé par un expert indépendant, salué par la Commission, planifié sur une période de deux ans, et réalisé sur un an, conduise à la dissolution de l'association qui l'avait mis en œuvre. Il a reproché à la Commission son silence (en juillet 2004, en décembre 2004 et en février 2006).

Enfin, le plaignant a affirmé que la décision de la Commission ne tenait pas compte du travail effectivement réalisé. Il a expliqué que, sans les contributions de partenaires, qui ont envoyé des images gratuites, le site n'existerait pas. Il en va de même pour le temps passé à évaluer les médias dans les pays européens. Une telle pratique n'était pas interdite dans la convention signée en 2002. Le plaignant a demandé au Médiateur de trouver une solution à la situation.

En substance, le plaignant a allégué que la décision de la Commission de ne pas lui verser la somme de 46 291,86 EUR et sa décision de recouvrer un montant de 88 319,15 EUR, n'étaient pas justifiées compte tenu du travail réalisé pendant toute la durée du projet.

L'ENQUÊTE

L'avis de la Commission

L'avis de la Commission peut être résumé de la manière suivante :

La Commission a rappelé que, le 30 décembre 2002, elle avait signé une convention de subvention avec le plaignant pour un montant total de 303 155 EUR, à savoir 60 % du budget total du projet. Le 3 mars 2003, la Commission a effectué un premier versement de 242 524 EUR, correspondant à 80 % du montant de la subvention.

La Commission a rejeté le premier rapport final envoyé par le plaignant, pour non-respect du modèle contractuel. La Commission a demandé des informations complémentaires concernant le second rapport final. La réponse à cette demande a été jugée insuffisante. Dans sa lettre datée du 14 juillet 2004 adressée au plaignant, la Commission a fait part de sa déception par rapport aux résultats techniques obtenus relativement au site et l'a informé qu'il avait jusqu'au 31 juillet 2004 pour compléter le site. La Commission a jugé les améliorations apportées insuffisantes et a nommé un expert indépendant pour évaluer les résultats du projet. L'expert a attribué au site une note de 24/40.

Parallèlement à cette évaluation, une analyse financière du projet a été réalisée. Elle a abouti à un budget «éligible» de 428 205,04 EUR et à une subvention finale de 256 923,14 EUR, à savoir 60 % du budget total «éligible». Par conséquent, un solde de 14 399,14 EUR a été versé au plaignant le 7 avril 2005 au lieu des 60 631 EUR attendus.

L'analyse financière du projet a estimé que les dépenses suivantes étaient «inéligibles» :

  • 58 562,50 EUR en frais de personnel pour défaut de justificatifs ;
  • 2 277,07 EUR en frais généraux pour dépassement du pourcentage autorisé ;
  • 5 741,59 EUR en frais de transport et séjour pour utilisation abusive du taxi, défaut de justificatifs et notes de restaurant trop élevées ;
  • 2 896,59 EUR en frais de droits d'auteur pour des résultats qui n'apparaissent pas sur le site ;
  • 77,74 EUR pour des traductions dans des langues inéligibles ; et
  • 26 916 EUR en frais de production pour absence de justificatifs.

La Commission a demandé les justificatifs manquants. Le plaignant a fourni des déclarations sur l'honneur signées par lui-même.

Les 17 et 18 mai 2005, le projet a fait l'objet d'un audit complet qui est parvenu à la conclusion qu'un montant de 243 669,58 EUR était «inéligible», essentiellement pour défaut de pièces justificatives. En particulier, les dépenses suivantes ont été déclarées «inéligibles» :

  • Frais de personnel facturés par les partenaires (131 475,60 EUR), pour défaut de pièces justificatives, telles que des factures ou des bulletins de paie. La seule preuve apportée est une déclaration signée par le plaignant.
  • Frais de personnel (EUR 3 564,08) encourus en dehors de la période d'éligibilité.
  • Frais généraux (EUR 10 121,49), pour défaut de pièces justificatives, telles que des factures. La seule preuve apportée est une déclaration signée par le plaignant.
  • Frais de transport et de séjour engagés par les partenaires (6 031,93 EUR), pour défaut de pièces justificatives, telles que des factures. La seule preuve apportée est une déclaration signée par le plaignant.
  • Frais de transport et de séjour (313,45 EUR) qui n'ont pas été payés par le plaignant.
  • Frais de production, de diffusion et d'information encourus par les partenaires (92 055,03 EUR), pour défaut de pièces justificatives, telles que des factures. La seule preuve apportée est une déclaration signée par le plaignant.
  • Frais de production, de diffusion et d'information (108 EUR) comptabilisés deux fois.

Par conséquent, le montant total de la subvention aurait dû être de 168 603,99 EUR. Un montant de 88 319,15 EUR devait donc être recouvré.

Le 13 février 2006, la Commission a informé le plaignant de son intention de recouvrer 88 319,15 EUR et de la possibilité de faire appel de cette décision dans un délai de 60 jours.

Le 6 novembre 2006, en l'absence de réaction du plaignant, la Commission lui a envoyé une lettre de rappel. Le plaignant a ensuite pris contact avec la Commission, et a précisé qu'il avait répondu à la lettre de la Commission. La Commission a demandé au plaignant de lui faire parvenir une copie de cette lettre, mais elle n'a rien reçu et par conséquent la Commission a envoyé une note de débit le 26 décembre 2006.

Le 26 mars 2007, le plaignant a envoyé une copie de sa lettre datée du 5 avril 2006, ainsi que des copies de la convention de subvention, des attestations de dépenses signées par lui-même ainsi qu'un descriptif des apports en nature, qui, selon lui, devraient être pris en considération par la Commission. Il a également renouvelé sa demande du versement complet de la subvention en invoquant la bonne qualité du projet.

Le 4 avril 2007, la Commission a répondu au plaignant qu'elle maintenait sa position. Elle a précisé que plusieurs documents joints à la lettre du plaignant concernaient les apports en nature de partenaires. La Commission a rappelé au plaignant que, conformément à la convention de subvention, la Commission aidait le plaignant à mettre le projet en œuvre en payant une partie des dépenses nécessaires pour atteindre les résultats. Si certains résultats ont été obtenus sans engagement de dépenses, ils ne doivent pas être comptabilisés dans le calcul du montant de la subvention. La Commission a également fait référence à l'article 4 de la convention de subvention, qui prévoit que le bénéficiaire ne peut en aucun cas tirer un profit de la subvention pendant la durée de la convention.

La Commission a expliqué qu'elle n'avait jamais reçu la lettre du plaignant datée du 5 avril 2006 et son courrier électronique daté du 23 novembre 2006 auquel la lettre du 5 avril 2006 était supposée être jointe.

En ce qui concerne les dépenses jugées «inéligibles» (notamment les apports en nature), la Commission a rappelé que les dispositions de l'appel à propositions «Actions préparatoires et innovatrices 2002/b - e-Learning»(1), notamment les paragraphes 9.1 et 9.2, ainsi que le paragraphe 9.4 de l'annexe II de la convention de subvention traitaient de la question des apports en nature. Ils stipulent que de telles contributions sont considérées comme inéligibles.

La Commission a maintenu que la somme de 88 319,15 EUR devait être recouvrée et qu'elle ne verserait pas le montant de 46 291,86 EUR demandé par le plaignant.

Les observations du plaignant

Les observations du plaignant peuvent être résumées de la manière suivante :

Le plaignant a proposé une solution à l'amiable : d'une part, il renonce au versement de la somme de 4 6 291,86 EUR ainsi que de tout dédommagement et, d'autre part, la Commission renonce à demander le remboursement des 88 319,15 EUR.

LA DÉCISION

1 Le prétendu ordre de recouvrement indu de 88 319,15 EUR et le refus de payer la somme de 46 291,86 EUR

1.1 La plainte a été déposée par le Président d'une association dénommée «Association Groupe L'image». Le 20 décembre 2002, le Président, ci-après le plaignant, a signé une convention de subvention avec la Commission européenne pour un montant maximal de 303 155 EUR. La Commission a effectué un premier versement de 242 524 EUR. Après l'analyse financière du projet et la conclusion selon laquelle la subvention finale ne devrait atteindre que 256 923,14 EUR, la Commission a versé le solde de la subvention, à savoir 14 399,14 EUR. Après un audit du projet, la Commission a estimé qu'un montant de 168 603,99 EUR seulement devait être versé. La Commission a fait observer que le plaignant avait demandé le remboursement des apports «en nature», alors que ce ne sont pas des coûts «éligibles».

Le plaignant a allégué que la décision de la Commission de ne pas lui verser la somme de 46 291,86 EUR et de recouvrer un montant de 88 319,15 EUR était injustifiée, compte tenu du travail réalisé pendant le projet.

1.2 Dans son avis, la Commission a expliqué que l'appel à propositions «Actions préparatoires et innovatrices 2002/b - e-Learning», notamment les paragraphes 9.1 et 9.2, ainsi que le paragraphe 9.4 de l'annexe II de la convention de subvention, stipulait que les apports en nature étaient «inéligibles». De surcroît, certaines des dépenses déclarées n'étaient pas appuyées par des pièces justificatives et étaient de ce fait «inéligibles».

La Commission a maintenu que la somme de 88 319,15 EUR devait être recouvrée et qu'elle ne paierait pas la somme de 46 291,86 EUR demandée par le plaignant.

1.3 Concernant l'allégation susmentionnée, le Médiateur attire l'attention sur les points suivants.

1.4 L'examen auquel le Médiateur peut procéder dans des affaires de litiges concernant des conventions de subvention est forcément limité. Le Médiateur ne doit notamment pas chercher à déterminer s'il y a eu violation de la convention de subvention par l'une ou l'autre des parties. Cette question ne pourrait être tranchée valablement que par une juridiction compétente, qui aurait la possibilité d'entendre les arguments des parties concernant la législation applicable et d'évaluer les preuves contradictoires concernant toute question de fait contestée. Dans des affaires comme celles-ci, le Médiateur est en droit de se limiter, dans son enquête, à examiner si l'institution ou l'organe communautaire lui a fourni un compte rendu cohérent et raisonnable du fondement juridique de ses actions et des raisons justifiant sa position.

1.5 Selon l'article 4.1 de la convention de subvention, le coût total estimé du projet s'élevait à 505 258 EUR. Conformément à l'article 4.2, la Commission offrait une subvention pouvant aller jusqu'à 303 155 EUR, ce qui correspondait à 60 % du coût total estimé. L'article 5.1 prévoit qu'un premier versement équivalant à 80 % de la subvention serait payé dans un délai de 60 jours calendrier suivant la date de réception par la Commission de la convention signée par les deux parties. Le solde serait versé dans un délai de 60 jours suivant l'acceptation expresse par la Commission du rapport final.

1.6 Le Médiateur note que, selon les résultats d'un audit réalisé par un cabinet d'audit indépendant, une partie des dépenses déclarées étaient inéligibles.

1.7 Le Médiateur soumet également les observations suivantes en ce qui concerne l'inéligibilité de certains postes de dépenses.

Frais de personnel encourus en dehors de la période d'éligibilité

En vertu de l'article 9.1 de l'annexe II de la convention de subvention, «[les coûts éligibles] doivent avoir été encourus pendant la période d'activité». Dans le présent cas, la période d'éligibilité commençait le 1 er décembre 2002 pour se terminer le 1 er décembre 2003. Le plaignant n'a fourni aucune preuve contraire à la déclaration de la Commission selon laquelle le montant de 3 564,08 EUR, correspondant à des frais de personnel, avait été encouru en dehors de la période d'éligibilité.

Coûts dépourvus de pièces justificatives

En vertu de l'article 41 du règlement financier(2), en vigueur au moment de la signature de la convention de subvention, «1. Toute liquidation d'une dépense est subordonnée à la présentation des pièces justificatives attestant les droits du créanciers et les services fournis ou l'existence d'un document justifiant le paiement.» En outre, les dispositions de l'appel à propositions «Actions préparatoires et innovatrices 2002/b - e-Learning»(3) et de l'annexe II de la convention de subvention «Conditions générales applicables à la subvention»(4) précisent que les coûts éligibles doivent être comptabilisés ou apparaître sur des documents fiscaux du bénéficiaire et être identifiables et contrôlables.

Le plaignant soutient que ces dépenses correspondent à des apports en nature, pour lesquels il a fourni des déclarations sur l'honneur signées par lui-même. En vertu de l'article 9.4 de l'annexe II de la convention de subvention : «Les coûts suivants ne sont pas considérés comme éligibles :(...) apports en nature».

Coûts qui n'ont pas été payés par le plaignant

L'article 9.1 de l'annexe II de la convention de subvention stipule que les coûts éligibles «doivent avoir été réellement encourus». Le plaignant ne conteste pas la déclaration de la Commission selon laquelle un montant de 313,45 EUR n'a pas été payé par le plaignant.

Coûts comptabilisés deux fois

L'article 9.1 dispose également que les coûts éligibles «doivent être raisonnables et respecter les principes de bonne gestion financière». Les dépenses comptabilisées deux fois ne sont pas conformes à ce principe.

1.8 Au vu de ce qui précède, le Médiateur est d'avis que la Commission a fourni suffisamment de preuves cohérentes justifiant sa position en ce qui concerne l'inéligibilité des coûts déclarés par le plaignant. Il ne constate donc pas de mauvaise administration.

1.9 Le plaignant a également invoqué le fait que la Commission était restée silencieuse à plusieurs reprises et qu'il a dû la contacter en juillet 2004, décembre 2004 et février 2006.

Le Médiateur rappelle que la bonne pratique administrative consiste à répondre rapidement aux lettres et aux demandes des citoyens. Après avoir examiné la correspondance entre le plaignant et la Commission figurant dans le dossier, le Médiateur estime que la Commission a répondu au plaignant dans un délai raisonnable.

2 Conclusion

Il apparaît, sur la base des enquêtes menées par le Médiateur, qu'il n'y a pas eu de mauvaise administration de la part de la Commission. Le Médiateur décide donc de classer l'affaire.

Le Président de la Commission sera également informé de la présente décision.

Veuillez agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.

 

P. Nikiforos DIAMANDOUROS


(1) JO 2002 C 179, p. 14.

(2) Règlement financier du 21 décembre 1977 applicable au budget général des Communautés européennes (JO 1977 L 356, p. 1).

(3) JO 2002 C 179, p. 14. L'article 9.1 stipule que «[les coûts éligibles] doivent être comptabilisés, identifiables et contrôlables».

(4) L'article 9.1 de l'annexe II prévoit ce qui suit : «On entend par coûts éligibles de l'activité les coûts qui remplissent les critères suivants : (...)

- ils doivent avoir été réellement encourus, être comptabilisés ou apparaître sur les documents fiscaux du bénéficiaire et être identifiables et contrôlables.»