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Décision du Médiateur européen concernant la plainte 1258/2002/ADB contre la Commission européenne


Strasbourg, 21 juillet 2003

Monsieur,

Le 4 juillet 2002, vous avez introduit auprès du Médiateur européen une plainte concernant le refus de l'École européenne d'Ixelles d'inscrire votre fils en première année primaire.

Le 18 juillet 2002, mon prédécesseur a transmis la plainte au Président de la Commission européenne. Le 17 septembre 2002, vous avez envoyé des informations complémentaires concernant la correspondance entre vous et l'École européenne. La Commission a présenté son avis le 29 octobre 2002. Mon prédécesseur vous a transmis celui-ci en vous invitant à formuler des observations, que vous avez envoyées le 19 décembre 2002. Le 29 janvier 2003, un avis complémentaire a été demandé à la Commission. Celle-ci l'a envoyé le 11 mars 2003. Cet avis vous a été transmis en vous invitant à formuler des observations le 20 mars 2003. J'ai reçu vos observations complémentaires le 30 avril 2003.

Je vous écris afin de vous informer des résultats de l'enquête réalisée.

LA PLAINTE

La plainte initiale

Le plaignant est un fonctionnaire de la Commission européenne. Il souhaitait inscrire son fils en première année primaire à Ixelles, l'une des trois Écoles européennes de Bruxelles (Uccle, Woluwé et Ixelles). Le 19 mars 2002, il a introduit une demande en ce sens à l'École d'Ixelles qui est très proche de son lieu de résidence. L'inscription à l'École d'Ixelles aurait été confirmée le 27 mars 2002. Toutefois, le 17 juin 2002, le directeur de l'École a refusé d'admettre le fils du plaignant dans une classe francophone de première année primaire nouvellement créée car elle était complète (32 élèves) et a conseillé au plaignant de prendre contact avec l'École d'Uccle afin d'y inscrire son fils. Cette École étant nettement plus éloignée du lieu de résidence de sa famille, le plaignant était peu disposé à accepter cette proposition.

Le plaignant a introduit une plainte auprès de la Commission en vertu de l'article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires, qui a été rejetée. Le 4 juillet 2002, le plaignant a dès lors introduit une plainte auprès du Médiateur européen en prétendant que le processus décisionnel concernant l'admissibilité des élèves dans les Écoles européennes n'était pas transparent.

Le plaignant ne comprend pas comment les 32 élèves ont été sélectionnés et estime que son fils répond à tous les critères définis par le règlement de l'École. Il voudrait être sûr que les décisions prises par l'École se basent sur des critères transparents et non arbitraires. Selon le plaignant, le directeur de l'École d'Ixelles ne lui a pas fourni de réponse satisfaisante et a donné des instructions afin de ne plus être dérangé par le plaignant.

Le plaignant déclare que la Commission finançant les Écoles européennes, ces dernières devraient respecter les principes de bonne administration. L'Union ne devrait pas financer un système dans lequel les décisions arbitraires sont pratique courante en matière d'inscription scolaire.

Informations complémentaires émanant du plaignant

Le 17 septembre 2002, le plaignant a informé le Médiateur que son fils avait été inscrit à l'École européenne d'Uccle. Toutefois, après un essai, les conditions de vie insupportables créées par la distance entre l'École et son lieu de résidence l'ont contraint de retirer son fils de l'École européenne. Dans sa lettre, le plaignant a fourni des informations complémentaires quant à la mauvaise administration, selon lui, de l'École d'Ixelles.

L'ENQUÊTE

L'avis de la Commission

L'avis de la Commission européenne sur la plainte est résumé ci-après:

Conformément à la convention définissant le statut des Écoles européennes du 12 avril 1957, les Écoles européennes relèvent de la responsabilité d'un organe intergouvernemental, le Conseil supérieur. Ce dernier n'est pas un organe communautaire. Il est composé de ministres des parties contractantes. Le 11 septembre 1957, la Communauté européenne a accepté de participer au financement des Écoles européennes et est simultanément devenue membre du Conseil supérieur. Elle est représentée par la Commission européenne.

Selon la convention, le Conseil supérieur décide des règles générales des Écoles. En vertu de l'article 47 des règles générales (version des 24 et 25 octobre 2000), le directeur de l'École décide de l'admission d'un enfant sur la base des conditions fixées par les articles 48 à 52 des règles générales ainsi que selon les directives du Conseil supérieur. Une de ces directives exige que l'inscription d'un élève soit refusée lorsqu'elle impliquerait la création d'une classe alors que des places sont disponibles dans d'autres Écoles européennes de la même ville. L'objectif est de respecter les exigences de bonne gestion financière des ressources disponibles. Le directeur qui refuse une inscription doit diriger les parents vers une École ayant des places disponibles.

Selon les informations fournies par les Écoles européennes, le refus d'admettre le fils du plaignant à l'École d'Ixelles était basé sur le manque de places disponibles en première année de la section primaire. Les places avaient été distribuées de manière prioritaire aux enfants provenant de la section maternelle de l'École. Plusieurs élèves ont été transférés des Écoles d'Uccle et de Woluwé dans le cadre d'une procédure visant à atténuer la congestion dans ces deux Écoles et les places restantes ont été attribuées au fur et à mesure des demandes. La gestion des inscriptions a été longuement discutée au sein du groupe de suivi des Écoles européennes de Bruxelles. Ce groupe est composé de représentants des parents, des directeurs des Écoles, de la Commission et d'une délégation belge.

Toutes ces informations ont été transmises au plaignant par le Conseil supérieur dans trois lettres, les 28 juin et 18 juillet 2002 (2 lettres).

Au vu de ce qui précède, il ne paraît pas justifié que la Commission dénonce l'accord signé avec les Écoles européennes ou de reconsidérer leur financement.

Les observations du plaignant

Le Médiateur européen a transmis l'avis de la Commission au plaignant en l'invitant à formuler des observations. Dans sa réponse du 19 décembre 2002, le plaignant a maintenu sa plainte. Sa position est résumée ci-après:

Il apparaît que les parents ne connaissent aucune disposition donnant la priorité aux enfants provenant de l'École maternelle. En outre, il est difficile de comprendre pourquoi des enfants ont été transférés des Écoles d'Uccle et Woluwé puisqu'il existait des places disponibles dans ces deux Écoles. Enfin, les parents n'ont pas été informés que les places seraient attribuées au fur et à mesure de l'introduction des demandes d'inscription. Il semble qu'il existe des exemples contredisant ce principe et la seule condition connue était de déposer la demande au cours d'une certaine période de temps.

Bien que les conditions budgétaires soient compréhensibles, le fait que l'Union finance des Écoles utilisant des règles changeantes et non écrites ne l'est pas. Il s'agit d'une question de crédibilité, de transparence et d'objectivité.

En finançant uniquement les Écoles européennes, la Commission crée un monopole pour ces Écoles. La Commission ne finance pas d'autre École ou ne finance pas l'instruction des enfants qui n'ont pas pu être inscrits dans une École européenne. Le plaignant estime que les parents ne peuvent choisir librement et soutient que la Commission devrait également financer d'autres Écoles (françaises, anglaises ou internationales).

Enfin, étant donné que les seules solutions existantes sont propres aux Écoles, le plaignant estime que la Commission devrait aider ses fonctionnaires lorsqu'ils rencontrent des problèmes avec les Écoles européennes. En présence de décisions arbitraires et de mauvaise administration au sein des Écoles, la seule possibilité est de soumettre la question au Médiateur européen.

L'ENQUÊTE COMPLÉMENTAIRE

Après un examen attentif de l'avis de la Commission et des observations du plaignant, le Médiateur a estimé devoir procéder à une enquête complémentaire. Le 29 janvier 2003, le Médiateur a donc écrit à la Commission pour lui demander des précisions (1) sur les éléments complémentaires figurant dans la lettre du plaignant du 17 septembre 2002, ainsi que (2) sur une nouvelle allégation et une nouvelle plainte présentées par le plaignant. Dans ses observations, le plaignant a allégué qu'en finançant exclusivement les Écoles européennes, la Commission crée un monopole et prive les parents d'un libre choix. Le plaignant réclame le financement d'autres Écoles.

L'avis complémentaire de la Commission

Dans son avis, la Commission résume sa position comme ci-après:

1. La Commission avait demandé au directeur de l'École d'Ixelles de faire une déclaration concernant l'allégation du plaignant de mauvaise administration par ses services. La Commission a fait référence à cette déclaration et y a souscrit. Selon celle-ci, le plaignant a simplement été informé oralement que son fils serait admis dans l'une des Écoles européennes. Le plaignant n'a jamais reçu l'assurance d'une inscription dans une École précise. Les parents étaient en principe informés de l'inscription de leurs enfants par écrit au cours du mois de juin. Dans ce cadre, le plaignant a été informé que son fils pourrait ne pas être inscrit à l'École d'Ixelles. La première année, nouvellement créée, de la section primaire à Ixelles comptait 32 enfants. La plupart des enfants provenaient de l'École maternelle de l'École. Ils ne pouvaient pas être raisonnablement exclus de l'École afin de permettre à d'autres enfants de s'y inscrire. Dans de très rares cas, afin de réunir des familles, des enfants des Écoles de Woluwé et d'Uccle ont été acceptés. Ces deux Écoles possèdent chacune deux classes francophones de première année primaire ayant chacune 23 ou 24 élèves. Dans la mesure où les classes des autres Écoles n'étaient pas complètes, pour des raisons de bonne gestion financière, aucun dédoublement de classe n'a été autorisé à l'École d'Ixelles, malgré les nombreux refus d'inscription et la pression importante liée à cette situation.

2. La contribution des Communautés européennes aux Écoles européennes est basée sur la Convention définissant le statut des Écoles européennes du 21 juin 1994. Celle-ci n'implique pas un monopole pour l'éducation. Les parents sont libres d'inscrire leurs enfants dans l'école de leur choix. À cette fin, ils reçoivent une allocation scolaire d'un montant égal aux frais effectifs de scolarité engagés par eux dans la limite du plafond statutaire.

La Commission a rejeté l'allégation du plaignant concernant le manque de transparence et le caractère arbitraire des procédures d'inscription. Les critères d'inscription sont clairs et l'École d'Ixelles les a respectés. Les associations de parents ont été bien informées des problèmes et les parents qui souhaitaient se plaindre ont été informés de la procédure prévue par l'article 27 de la Convention définissant le statut des Écoles européennes(1) du 21 juin 1994.

Les observations complémentaires du plaignant

Dans ses observations, le plaignant invoque les points suivants:

1. Le plaignant considère qu'il existe une divergence entre les critères d'inscription de l'École d'Ixelles mentionnés par la Commission dans son premier avis et dans son deuxième avis. Il ne comprend pas pourquoi des inscriptions ont été organisées, alors qu'il était évident que la classe était complète, et pourquoi des élèves ont été acceptés fin juin et sur la base de quels critères. Le plaignant déclare que le directeur de l'École d'Ixelles n'a jamais répondu à ses demandes d'éclaircissement. La lettre signifiant le refus d'inscription du fils du plaignant ne contient aucune explication ou indication quant aux moyens d'appel contre cette décision. La procédure de recours prévue par la Convention définissant le statut des Écoles européennes n'a été mentionnée ni par les directeurs des Écoles européennes ou le Conseil supérieur, ni par la Commission européenne. Enfin, le plaignant ne peut comprendre les raisons du refus de divulguer une liste des élèves admis et refusés en première année de la section primaire de l'École d'Ixelles.

Le plaignant estime que les critères d'inscription dans les Écoles européennes ne sont ni publics ni transparents.

2. L'allocation scolaire est payée pour les enfants sans tenir compte du fait qu'elle soit destinée à une École européenne ou à une autre école. Les écoles qui ne reçoivent pas une contribution des Communautés européennes imposent des coûts supplémentaires aux parents. Le plaignant estime dès lors qu'il existe une discrimination entre les enfants qui ont été admis et ceux qui ont été refusés par l'École européenne. Dans ce contexte, une plainte devant la Commission en vertu de l'article 90, paragraphe 2, a été introduite par le plaignant le 21 janvier 2003.

LA DÉCISION

1 Champ de l'enquête du Médiateur

1.1 Les Écoles européennes ont été initialement créées par les Communautés européennes et les États membres des Communautés européennes, qui ont signé le statut de l'École européenne en 1957. Le Médiateur a, de manière cohérente, adopté le point de vue selon lequel les Écoles européennes ne sont pas une institution ou un organe communautaire.

1.2 Toutefois, le Médiateur est également de l'avis que la Commission a une certaine responsabilité quant au fonctionnement des Écoles européennes car elle est représentée au Conseil supérieur et contribue largement à leur financement. Le Médiateur estime que la responsabilité de la Commission ne couvre pas les questions relatives à la gestion interne des Écoles.

1.3 Sur cette base, le Médiateur a demandé un avis à la Commission sur cette plainte. Toutefois, le litige individuel du plaignant avec l'École ne relève pas du champ de la présente enquête. Cela concerne également l'allégation faite par le plaignant dans ses observations complémentaires selon laquelle l'École européenne d'Ixelles aurait refusé de divulguer une liste des élèves admis et refusés en première année primaire.

1.4 Le Médiateur note que le plaignant, dans ses observations complémentaires, a également avancé une autre allégation concernant la possible discrimination par la Commission entre les parents qui envoient leurs enfants dans une École européenne et ceux qui les inscrivent dans une autre école de leur choix. La Commission n'a pas encore eu l'occasion d'exprimer son point de vue sur cette nouvelle allégation. Étant donné le stade avancé de la présente enquête, le Médiateur est d'avis que cette allégation ne devrait pas être traitée dans le cadre de la présente enquête. Le plaignant est cependant libre de soumettre une nouvelle plainte relative à cette allégation après avoir réalisé les démarches administratives préalables nécessaires auprès de la Commission.

2 Bonne administration dans les Écoles européennes

2.1 Le plaignant estime que le processus décisionnel concernant l'admission des élèves dans les Écoles européennes n'est pas transparent. Il déclare que la Commission finançant les Écoles européennes, celles-ci devraient respecter les principes de bonne administration. L'Union ne devrait pas financer un système où l'arbitraire constitue une pratique courante en matière d'inscription scolaire.

2.2 La Commission a déclaré que dans le cas du fils du plaignant, le directeur de l'École européenne d'Ixelles avait refusé son inscription sur la base des dispositions applicables et pour des raisons raisonnables. La Commission a dès lors rejeté l'allégation du plaignant.

2.3 Le Médiateur voudrait faire référence au projet de recommandation du 10 décembre 2002 adressé à la Commission dans le cadre d'une enquête du Médiateur dans l'affaire 845/2002/IJH(2). Le projet de recommandation du Médiateur fait suite à une plainte de 50 parents d'élèves des Écoles européennes de Bruxelles concernant la manière dont les places étaient attribuées entre les trois Écoles pour l'année académique 2002-03, y compris l'admission d'élèves à l'École d'Ixelles. Cela a mené à plus de 200 recours internes.

Le Médiateur estime que la réponse de la Commission face aux événements qui ont donné lieu à la plainte 845/2002/IJH n'a pas su démontrer qu'elle reconnaissait pleinement sa responsabilité dans la promotion d'une bonne administration par les Écoles européennes. Le Médiateur a dès lors recommandé ce qui suit:

"La Commission devrait reconnaître sa responsabilité dans la promotion de la bonne administration par les Écoles européennes et présenter les mesures concrètes qu'elle prendra pour assumer cette responsabilité à l'avenir."

2.5 Le 25 février 2003, la Commission a informé le Médiateur européen que bien que ses pouvoirs ne couvrent pas les questions relevant de la gestion interne des Écoles européennes, elle avait suivi de près l'évolution de ce dossier. La Commission a déclaré qu'elle attirerait de nouveau l'attention du secrétaire général des Écoles européennes sur le fait qu'à l'avenir, tout spécialement lorsque la quatrième École de Bruxelles s'ouvrira, toutes les mesures nécessaires soient prises pour garantir que les transferts d'élèves se fassent dans des conditions optimales.

2.6 Étant donné que les questions soulevées par le plaignant dans la présente plainte sont similaires à celles qui ont donné lieu au projet de recommandation précité, le Médiateur estime que la poursuite de l'enquête sur cet aspect de l'affaire n'est pas justifiée.

3 Création d'un monopole pour l'éducation

3.1 Le plaignant a allégué qu'en finançant exclusivement les Écoles européennes, la Commission crée un monopole et prive les parents d'un libre choix. Le plaignant a déclaré que d'autres écoles devraient également être financées.

3.2 La Commission a rappelé que la contribution des Communautés européennes aux Écoles européennes se basait sur la Convention définissant le statut des Écoles européennes du 21 juin 1994. Celle-ci n'implique pas un monopole pour l'éducation. Les parents sont libres d'envoyer leurs enfants dans l'école de leur choix. À cette fin, ils reçoivent une allocation scolaire d'un montant égal aux frais effectifs de scolarité engagés par eux dans la limite du plafond statutaire.

3.3 Le Médiateur note que, conformément au statut des fonctionnaires et aux dispositions d'application générales pour l'octroi de l'allocation scolaire du 1 mars 1975, une allocation scolaire est octroyée, sur demande, aux fonctionnaires et au personnel temporaire des Communautés européennes pour les enfants à charge qui suivent les cours à temps plein dans un établissement scolaire. Aucune distinction n'est faite quant à l'École choisie par les parents.

3.4 Rien ne laisse penser que la Commission, en octroyant une assistance financière aux Écoles européennes, entrave le libre choix des parents quant à la scolarité de leurs enfants.

3.5 Au vu de ce qui précède, le Médiateur conclut qu'il n'existe aucune preuve de mauvaise administration pour cet aspect de l'affaire.

4 Conclusion

Sur la base des enquêtes réalisées par le Médiateur sur cette plainte, l'enquête sur les allégations de manquement de promotion par la Commission d'une bonne administration par les Écoles européennes apparaît injustifiée. Le Médiateur n'a trouvé aucune mauvaise administration commise par la Commission européenne concernant l'allégation de création d'un monopole pour l'éducation. Le Médiateur classe donc l'affaire.

Le Président de la Commission européenne sera informé de la présente décision.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de ma considération distinguée.

 

P. Nikiforos DIAMANDOUROS


(1) Journal officiel L 212 du 17/08/1994, p. 0003 - 0014

(2) http://www.ombudsman.europa.eu/recommen/en/020845.htm