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Décision du Médiateur européen concernant la plainte 404/99/BB contre le Parlement européen


Strasbourg, le 8 juin 2001

Madame,

Le 12 avril 1999, vous m'avez adressé, en ma qualité de Médiateur européen, une plainte dans laquelle vous affirmez que le Parlement européen s'est rendu coupable de discrimination en vous engageant pendant une longue période en tant que personnel extérieur sur la base de contrats de service sans vous offrir de poste ou régulariser votre situation. En outre, vous alléguez des irrégularités dans le fonctionnement interne des archives micrographiques et dans l'exécution des appels d'offres relatifs à ces contrats de service.

J'ai transmis votre plainte à la Présidente du Parlement le 26 mai 1999. Le Parlement m'a envoyé son avis le 6 septembre 1999 et je vous en ai donné communication en vous invitant à formuler toutes observations que vous jugeriez utiles. Vos observations sur l'avis du Parlement me sont parvenues le 26 octobre 1999.

Le 4 mai 2000, vous m'avez envoyé un nouveau courrier contenant un certificat du Parlement correspondant à la période pendant laquelle vous avez travaillé au Parlement européen, plusieurs listes de documents, une référence pour la période pendant laquelle vous avez travaillé comme auxiliaire au Parlement européen.

Les 20 et 22 juin 2000, votre avocat, M. SCOTT, a envoyé deux lettres au Médiateur l'informant qu'il vous représentait dans la présente plainte et demandant des informations sur l'enquête menée par le Médiateur sur votre plainte. Dans sa lettre il m'informait qu'une copie du dossier de la plaignante avait été envoyé à la Cour des comptes le 21 juillet 1999. M. Scott joignait une liste du contenu de ce dossier.

Le 21 juillet 2000, le Médiateur a répondu à M. Scott pour l'informer que l'enquête sur votre plainte était en cours.

Le 11 octobre 2000, M. Scott a envoyé un courrier à M. Priestley demandant qu'une solution soit trouvée à cette plainte. Le même jour, M. Scott a écrit au Médiateur lui demandant qu'une réunion soit organisée entre le Parlement européen et la plaignante. M. Scott avait joint une copie de la lettre qui vous aviez été envoyée le 4 octobre 2000 par M. Priestley dans laquelle il demandait que vous lui communiquiez tout élément nouveau ayant trait à votre plainte afin de procéder à une enquête distincte.

Les deux parties semblant désirer échanger leurs vues et leurs informations, j'ai écrit à la Présidente du Parlement le 26 octobre 2000 pour lui suggérer d'organiser une réunion entre les représentants du Parlement et vous, afin de débattre de l'affaire en question. J'ai sollicité être informé des résultats de la réunion avant le 31 janvier 2001. Le 31 janvier 2001, la Présidente du Parlement a envoyé une lettre informant le Médiateur des résultats de cette réunion.

Je vous fais part à présent des résultats de mon enquête.


LA PLAINTE

La plaignante affirme avoir été victime d'une discrimination en cela qu'après avoir été employée dans les locaux du Parlement pendant une très longue période au service des archives micrographiques, elle n'a pas été recrutée directement par le Parlement.

La plaignante a été employée comme agent auxiliaire par le Parlement au cours des périodes suivantes:

14.07.1980 - 13.11.1980
15.01.1981 - 15.05.1981
17.05.1982 - 26.11.1982
01.02.1983 - 31.08.1983

La plaignante a été mise à la disposition du Parlement sur la base de contrats de service par des sociétés privées spécialisées dans la micrographie, sélectionnées au cours de diverses procédures d'appel d'offres pendant les périodes suivantes:

Société ARTIBUREAU
15.11.1980 - 15.12.1980
01.06.1981 - 15.12.1981
03.01.1982 - 15.05.1982
01.12.1982 - 31.01.1983 (temps partiel)
Société KIEFFER
01.01.1983 - 30.09.1987
Société KODAK
01.01.1987 - 15.02.1989
Société SERVITIA
15.02.1989 - 08.02.1999

Le 8 février 1999, la plaignante a remis sa démission à la société SERVITIA

La plaignante affirme qu'on lui avait promis qu'un concours serait organisé. La plaignante constate qu'elle a dépassé la limite d'âge lui permettant de participer aux concours et qu'elle n'est donc plus admissible à concourir.

En outre, la plaignante affirme que le Parlement l'a recommandé à différentes sociétés qu'elle ne connaissait pas, ces sociétés n'ayant toujours entretenu de relations qu'avec le chef du service des archives officielles du Parlement. Selon elle, elle n'a jamais rencontré le responsable de la première société extérieure pour laquelle elle était censée travailler.

La plaignante affirme qu'elle devrait être en droit d'obtenir un poste au service des archives micrographiques du Parlement et que sa situation devrait être régularisée.

La plaignante prétend également avoir constaté des irrégularités dans le fonctionnement interne des archives micrographiques et dans l'exécution des appels d'offres. Selon elle, les travaux n'ont jamais été réalisés conformément aux appels d'offres et de fausses factures ont été envoyées aux sociétés. La plaignante indique qu'elle dispose d'une liste de personnes qui n'ont jamais été déclarées ni à la caisse d'assurance maladie ni aux autorités fiscales.

L'ENQUÊTE

L'avis du Parlement européen

Dans ses commentaires, le Parlement affirme que l'AIPN a toujours privilégié le recours à l'extérieur pour les travaux de microfilmage importants. Selon le Parlement, la plaignante demande que lui soit conféré le statut de fonctionnaire et veut récupérer son poste aux archives. Le Parlement explique que la plaignante a bénéficié de contrats "auxiliaire" au Parlement pendant les périodes suivantes:

du 14.07.1980 au 31.11.1980
du 15.01.1981 au 15.05.1981
du 17.05.1982 au 26.11.1982
du 01.02.1983 au 31.08.1983 à mi-temps

Elle a ensuite effectué des travaux dans les locaux du Parlement européen pour le compte de sociétés extérieures ayant conclu un contrat de prestations de service avec le Parlement, selon une durée et des horaires précisés dans les cahiers des charges et les bons de commande.

Durant ses périodes de salariat auprès d'entreprises extérieures, la plaignante n'a eu aucun lien administratif ni financier avec le Parlement européen. Toutes ses fiches de salaires ont été délivrées par les diverses sociétés qui l'employaient.

L'article 28 du statut stipule clairement que nul ne peut être nommé fonctionnaire s'il ne satisfait pas à un concours sur titre, sur épreuves ou sur titres et épreuves. Tous les concours font l'objet d'une publicité au sein des institutions et dans la presse. Rien ne s'opposait donc à ce que Mme M. se porte candidate aux nombreux concours organisés périodiquement par le Parlement européen et les autres institutions.

La plaignante a affirmé qu'elle avait dépassé la limite d'âge lui permettant de passer des concours. Il convient à cet égard de préciser que la limite d'âge pour poser sa candidature à un concours est de 45 ans révolus (âge que Mme M. n'a pas encore atteint), avec dérogations possibles sous certaines conditions.

En ce qui concerne sa demande de récupérer son poste auprès de la société SERVITIA, le Parlement souligne que c'est la plaignante elle-même qui a présenté sa démission à son employeur.

La plaignante fait grief au Parlement d'avoir recommandé son recrutement aux différentes sociétés attributaires des marchés dans le cadre desquels elle exerçait ses prestations. L'institution l'a effectivement recommandée à ces sociétés en faisant référence à son expérience professionnelle sans toutefois avoir qualité pour imposer son recrutement. Ces recommandations ont été faites à son avantage et ce grief est en tout état de cause irrecevable, la plaignante n'ayant pas subi de préjudice du fait de son recrutement par les sociétés concernées.

La plaignante affirme ne pas connaître les sociétés pour lesquelles elle a travaillé. Les documents annexés à sa plainte démontrent le contraire:

- fiches de salaires émanant de ces sociétés

- certificat de la société SERVITIA qui indique que son horaire est de 8h30 à 17h30 avec une interruption d'une heure à midi, ce qui l'empêche de se déplacer pour prendre sa fille durant les heures de repas. Ce certificat lui a été délivré par son employeur et non par l'institution;

- lettres des sociétés demandant à la plaignante de se présenter dans leurs locaux pour se voir remettre ses contrats

- lettre du chef du service des archives du Parlement européen à la société SERVITIA portant une appréciation sur la qualité du travail de la plaignante

- tous les contrats de travail conclus entre la plaignante et les différentes sociétés pour lesquelles elle a travaillé ont été signés conjointement par la plaignante et les représentants des sociétés concernées.

La société SERVITIA a en outre informé le Parlement que la plaignante bénéficiait de tickets repas et qu'elle travaillait également les vendredi après-midi, libres au Parlement européen, dans les locaux et pour le compte de la société SERVITIA. Des cadres des sociétés venaient régulièrement se rendre compte sur place de son travail.

La plaignante a joint à sa plainte une liste de personnes qui auraient travaillé dans le service des archives du Parlement européen sans être déclarées, ni à la caisse de maladie, ni aux services fiscaux. Le Parlement a contesté cette information et présenté une liste des agents auxiliaires et des fonctionnaires travaillant pour le Parlement européen.

Le Parlement a affirmé qu'il était impossible que des fonctionnaires travaillent sans être déclarés. Les agents auxiliaires employés par le Parlement sont déclarés régulièrement aux différentes caisses obligatoires. Quant aux personnes employées par les sociétés prestataires de services, la lecture des fiches de salaire de la plaignante ne fait pas apparaître d'irrégularités.

Les personnes externes à l'institution qui ont été appelées à exercer des travaux pour le compte des archives et qui ne relevaient pas du personnel du Parlement ont eu l'un des statuts suivants: prestataire de services, sous-traitant d'une société commerciale, membre du personnel d'une société commerciale ou personnel intérimaire (jusqu'en 1993/1994).

La plaignante affirme que les travaux à façon fixés par les appels d'offres n'ont jamais été réalisés et que des fausses factures ont été expédiées aux sociétés.

En 1995, le responsable des archives indiquait au Directeur du personnel que son service avait la possibilité de faire appel à des prestations extérieures pour des travaux d'archivage et de micrographie. Pour exécuter ces travaux, ce service a mis en oeuvre la procédure prévue par le règlement financier et a toujours traité avec les sociétés sélectionnées sur la base du rapport "qualité/prix". Le Parlement a précisé que la plaignante avait été mise à sa disposition par les sociétés concernées selon des modalités qui relevaient de la relation contractuelle entre la plaignante et son employeur. Le Parlement européen n'a eu de relation contractuelle qu'avec les sociétés sélectionnées. En outre, le contrôleur financier n'a jamais fait d'observations sur l'exécution des prestations et les pièces qui ont été soumises à son visa. Le service des archives a indiqué qu'il n'avait jamais pris d'engagement à l'égard d'aucun des agents mis à sa disposition dans le cadre d'une prestation de service, même s'il avait apprécié une constance de qualité dans la mesure où il bénéficiait d'une personne familiarisée au travail du service selon la spécificité du cahier des charges. Enfin, les bons de commandes de travaux ont toujours précisé que le prestataire était seul responsable du personnel et qu'il devait le sélectionner, voire le remplacer, en fonction des critères posés par le service des archives.

Selon le Parlement, les contrats signés par la plaignante l'engageaient à s'abstenir de divulguer des informations. Le Parlement a indiqué qu'au cours d'une réunion entre elle et les représentants du Parlement, la plaignante a produit un ensemble de photocopies de décomptes et un dossier qu'elle s'était procuré illégalement et en violation avec son contrat dans l'exercice de ses fonctions.

Le Parlement estime qu'aucun des griefs avancés par la plaignante n'est étayé par un quelconque élément de preuve.

Les observations de la plaignante

La plaignante a maintenu sa plainte. Elle a affirmé qu'elle travaillait dans les locaux du Parlement et non pour des sociétés extérieures. Selon la plaignante les ordres qu'elle recevait émanaient du fonctionnaire du Parlement qui avait conclu les contrats avec les sociétés extérieures.

Enquête complémentaire

Les deux parties ayant semblé souhaiter un échange de vues et d'informations, le Médiateur a demandé le 26 octobre 2000 que le Parlement organise une réunion bilatérale avec la plaignante et son représentant, M. Scott, afin de parler de l'affaire. Le Médiateur a demandé que des informations sur le résultat de cette réunion lui soient transmises au plus tard le 31 janvier 2001.

Le 31 janvier 2001, la Présidente du Parlement a envoyé un courrier au Médiateur pour l'informer des résultats de la réunion. Il est ressorti de la lettre du Parlement que les deux parties n'avaient pas réussi à trouver une solution à cette affaire.

LA DÉCISION

1 Allégation de discrimination, le Parlement n'ayant pas offert de poste à la plaignante ou régularisé sa situation en dépit d'une longue période de travail en tant que personnel extérieur dans le cadre de contrats de service passés entre le Parlement et diverses sociétés extérieures

1.1 La plaignante affirme avoir été victime d'une discrimination en cela qu'après avoir été employée dans les locaux du Parlement pendant une très longue période au service des archives micrographiques, elle ne lui a pas été offert de poste et sa situation n'a pas été régularisée. Selon les dires de la plaignante, il lui avait été promis qu'un concours finirait par être organisé. La plaignante note qu'elle a passé la limite d'âge lui permettant de faire acte de candidature aux concours et qu'elle n'est donc plus éligible à passer un concours. En outre, la plaignante affirme que le Parlement a recommandé son recrutement à diverses sociétés qu'elle ne connaissait pas.

1.2 Selon le Parlement, l'AIPN a toujours privilégié le recours à l'extérieur pour les travaux de microfilmage importants. Au cours de la période pendant laquelle la plaignante a travaillé en tant qu'employée de sociétés extérieures, elle n'a eu aucune relation administrative ni financière avec le Parlement européen. Toutes ses fiches de paie émanent des différentes sociétés qui l'ont employée.

1.3 Selon le Parlement, l'article 28 du statut stipule clairement que nul ne peut être nommé fonctionnaire s'il ne satisfait pas à un concours sur titre, sur épreuves ou sur titres et épreuves. Tous les concours font l'objet d'une publicité au sein des institutions et dans la presse. Rien ne s'opposait donc à ce que la plaignante se porte candidate aux nombreux concours organisés périodiquement par le Parlement européen et les autres institutions.

1.4 La plaignante a affirmé qu'elle avait dépassé la limite d'âge lui permettant de passer des concours. Le Parlement a précisé que la limite d'âge pour poser sa candidature à un concours est de 45 ans révolus, avec dérogations possibles sous certaines conditions. La plaignante pouvait par conséquent présenter sa candidature aux concours organisés par les institutions communautaires.

1.5 En ce qui concerne la demande de la plaignante de récupérer son poste chez SERVITIA, le Parlement souligne que c'est la plaignante elle-même qui, de sa propre initiative, a donné sa démission à son employeur.

1.6 Sur la base des informations qui lui ont été transmises à la fois par la plaignante et le Parlement, le Médiateur comprend qu'au cours des périodes pendant lesquelles elle a travaillé en tant qu'employée de sociétés extérieures, la plaignante avait conclu, avec diverses sociétés extérieures, des contrats de travail temporaires régis par le droit luxembourgeois.

1.7 Le Médiateur en conclut que conformément à l'article 28, paragraphe d), du statut, un fonctionnaire ne peut être nommé, sous réserve des dispositions de l'article 29, paragraphe 2, que s'il a satisfait à un concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves dans les conditions prévues à l'annexe III du statut. Il apparaît que la plaignante n'a pas passé de concours conformément à l'article 28, paragraphe d) du règlement. En conséquence, le Médiateur estime qu'il n'y a pas eu discrimination dans ce cas particulier et aucun cas de mauvaise administration ne semble avoir été établi dans le cadre de cette première allégation.

2 Allégation relative à des irrégularités dans le fonctionnement interne des archives micrographiques

2.1 La plaignante affirme que des irrégularités ont entaché le fonctionnement interne du service des archives micrographique et l'action du chef du service des archives officielles du Parlement européen. Elle a joint à sa plainte une liste de personnes qui auraient travaillé pour les archives du Parlement européen sans être déclarées ni à la caisse d'assurance maladie ni aux autorités fiscales.

2.2 Dans son avis, le Parlement a contesté cette information concernant des employés qui auraient travaillé sans être déclarés, ni à la caisse de maladie, ni aux services fiscaux. Le Parlement a affirmé qu'il était impossible que des fonctionnaires travaillent sans être déclarés. Les agents auxiliaires employés par le Parlement sont déclarés régulièrement aux différentes caisses obligatoires. Quant aux personnes employées par les sociétés prestataires de services, la lecture des fiches de salaire de la plaignante ne fait pas apparaître d'irrégularités.

2.3 L'enquête du Médiateur n'a révélé aucun élément étayant l'allégation de la plaignante. Le Médiateur estime par conséquent qu'une enquête complémentaire concernant cette allégation n'est pas justifiée.

3 Allégation relative à des irrégularités dans le déroulement des appels d'offres

3.1 La plaignante affirme que les travaux qui relevaient des appels d'offres n'ont jamais été réalisés et que de fausses factures ont été envoyées aux sociétés.

3.2 Dans son avis le Parlement a affirmé qu'en 1995, le responsable des archives indiquait au Directeur du personnel que son service avait la possibilité de faire appel à des prestations extérieures pour des travaux d'archivage et de micrographie. Pour exécuter ces travaux, ce service a mis en oeuvre la procédure prévue par le règlement financier et a toujours traité avec les sociétés sélectionnées sur la base du rapport "qualité/prix". Le Parlement a affirmé que le contrôleur financier n'a jamais fait d'observations sur l'exécution des prestations et les pièces qui ont été soumises à son visa.

3.3 Il ressort des informations en possession du Médiateur que la plaignante a fait part de cette allégation à la Cour des comptes qui est l'organe spécialisé dans le contrôle des comptes et l'exécution du budget de l'Union européenne. Le Médiateur estime par conséquent qu'une enquête complémentaire de sa part sur cette allégation n'est pas justifiée.

4 Conclusion

Son enquête l'amenant à conclure qu'il n'y a pas eu en l'occurrence mauvaise administration de la part du Parlement européen, le Médiateur classe l'affaire.

La Présidente du Parlement européen sera informé de la présente décision.

Je vous prie d'agréer, Madame, l'expression de ma considération distinguée.

 

Jacob SÖDERMAN