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Décision du Médiateur européen concernant la plainte 1119/98/BB contre le Parlement européen


Strasbourg, le 26 avril 2000

Madame,
Le 20 octobre 1998, vous m'avez présenté, en ma qualité de Médiateur européen, une plainte concernant la décision en date du 12 novembre 1997 par laquelle le groupe Union pour l'Europe (ci-après "UPE", devenu UEN en 1999) du Parlement européen a mis fin à votre contrat d'agent temporaire.
J'ai transmis votre plainte au Président du Parlement européen le 7 janvier 1999. Le Parlement m'a envoyé son avis le 21 avril 1999, et je vous en ai donné communication en vous invitant à formuler toutes observations que vous jugeriez utiles. Vos observations me sont parvenues le 30 juin 1999.
Le 9 septembre 1999, vous avez téléphoné à mon secrétariat pour demander copie du document mentionné au point 3 de l'avis du Parlement. Mes collaborateurs ont pris contact à ce sujet avec les services du Parlement; ceux-ci ont envoyé une copie de ce document le 23 septembre 1999, laquelle vous a été transmise.
D'autre part, vous m'avez soumis des éléments complémentaires le 17 février 1999.
Le 14 septembre 1999, vous m'avez adressé une lettre exposant les problèmes que vous aviez avec l'École européenne.
Le 21 septembre 1999, vous m'avez transmis copie d'une lettre que vous aviez adressée à M. Pinck, à la Commission européenne, concernant le paiement du minerval de l'École européenne. Et vous m'avez communiqué, le lendemain, copie d'une deuxième lettre adressée à M. Pinck.
Le 3 novembre 1999, vous m'avez transmis copie d'une lettre adressée à M. Courtheoux, directeur général de l'Office régional bruxellois de l'emploi.
Je vous fais part à présent des résultats de mon enquête, en vous présentant mes excuses pour la durée de la procédure d'examen de votre plainte.

LA PLAINTE


En 1994, la plaignante entre au service d'un groupe politique du Parlement européen en tant que secrétaire dactylo. Elle est d'abord agent auxiliaire, puis agent temporaire. Le 12 novembre 1997, il est mis fin à son contrat d'agent temporaire. Le 26 mars 1998, en vertu de l'article 90 du statut des fonctionnaires, elle saisit l'autorité investie du pouvoir de nomination d'une réclamation dirigée contre cette décision, mais n'obtient pas satisfaction. Elle se tourne alors vers le Médiateur, avançant trois griefs.
En premier lieu, la décision qui met fin à son contrat d'agent temporaire n'aurait pas été motivée.
Deuxièmement, son rapport de notation aurait été établi tardivement et à son insu. Elle a reçu le 9 juillet 1998 la lettre du Parlement contenant son rapport de notation, envoyée par l'institution le 6 juillet 1998; le 12 octobre 1998, elle a fait part de ses observations sur ce rapport au secrétaire général du Parlement.
Enfin, elle aurait été victime d'un harcèlement professionnel. Elle affirme que des e-mails échangés avec son supérieur ont été effacés de sa messagerie électronique, bien qu'elle eût utilisé un mot de passe. Elle indique également qu'elle a réclamé une enquête à ce sujet dans un e-mail adressé à l'ensemble de ses collègues le 11 novembre 1997. Le lendemain, il lui était demandé de présenter des excuses pour avoir envoyé ce message, mais elle a refusé d'obtempérer. Et d'invoquer abus de pouvoir et discrimination de la part de fonctionnaires de la catégorie A du Parlement, accusés en outre d'incompétence.

L'ENQUÊTE


L'avis du Parlement
La plaignante a travaillé comme agent temporaire à partir du 1er janvier 1995, au titre d'un contrat qui fixait un préavis de trois mois en cas de résiliation par l'une ou par l'autre partie. Le contrat portait la signature du président de Forza Europa et de l'intéressée. Le groupe Forza Europa s'est fondu par la suite dans le groupe UPE, avant que, en 1997, une partie des députés italiens de l'UPE ne rejoigne le groupe PPE.
Un accord a été conclu entre le PPE et l'UPE portant sur des modifications d'organigramme. Les transferts de personnel ont pris effet au 22 juin 1998. Par lettre recommandée du 12 novembre 1997, les coprésidents de l'UPE avaient résilié le contrat de la plaignante avec effet au 28 février 1998, ce conformément à l'article 47 du Régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (RAA). Cette lettre ayant été retournée au groupe UPE, le secrétaire général du groupe en a remis une copie à l'intéressée en mains propres le 6 janvier 1998, avec report de la date de prise d'effet de la résiliation au 6 avril 1998.
Quant aux trois griefs principaux de l'intéressée, ils donnent lieu aux commentaires récapitulés ci-après.
(i) Licenciement abusif
La résiliation du contrat d'agent temporaire de l'intéressée s'est faite conformément aux dispositions de l'article 47 du RAA, qui ne soumettent à aucune obligation de motivation la résiliation de ce type de contrat.
L'absence d'une obligation de motivation n'a pas empêché le secrétaire général du Parlement européen d'expliquer à l'intéressée, par lettre du 14 octobre 1998, que les présidents des groupes politiques avaient adopté, le 17 février 1997, une clé de répartition des postes pour l'organigramme des groupes politiques et que cette répartition avait des conséquences pour le groupe UPE. Le secrétaire général a confirmé, en outre, que, conformément à la clé de répartition retenue, le poste de l'intéressée avait été attribué à un autre groupe politique du Parlement.
(ii) Établissement tardif, et à l'insu de l'intéressée, du rapport de notation
L'établissement et la transmission du rapport de notation de l'intéressée n'ont aucun lien avec le litige, qui porte principalement sur la légalité de la décision de licenciement. Néanmoins, il est vrai que ce rapport, qui couvre la période allant du 1er janvier 1995 au 1er janvier 1997, a été établi avec retard. Une partie de ce retard est imputable au congé de maladie de longue durée de l'intéressée: cette absence a fait obstacle à la tenue de l'entretien qui doit avoir lieu préalablement à la rédaction du rapport. En raison de ce congé de maladie, la cessation définitive des fonctions de l'intéressée n'a pu intervenir que le 5 juillet 1998. En effet, l'article 47, paragraphe 2, point a), du RAA stipule que le délai de préavis ne peut commencer à courir pendant la durée d'un congé d e maladie. L'intéressée ayant, à la suite de problèmes de relations humaines, travaillé successivement pour plusieurs administrateurs au cours de la période de deux ans couverte par le rapport de notation, le secrétaire général du groupe a été son notateur unique, étant entendu qu'il a pris l'avis des divers administrateurs dont elle avait été la collaboratrice. Par lettre du 6 juillet 1998, le Parlement lui a laissé un mois pour formuler des observations, ce qu'elle a omis de faire.
(iii) Harcèlement professionnel
Les accusations de harcèlement professionnel portées par l'intéressée ont trait, en fait, à l'exercice du pouvoir hiérarchique, qu'elle conteste. Il convient à cet égard de rappeler les obligations qui incombent aux fonctionnaires en vertu de l'article 21, deux premiers alinéas, du statut des fonctionnaires. En corollaire au devoir d'assistance et de conseil énoncé au premier alinéa dudit article 21, on peut ajouter un devoir de déférence et de correction envers ceux auxquels l'institution a conféré un pouvoir hiérarchique. De plus, en cas de critiques sérieuses, celles-ci doivent être fondées sur des preuves concrètes, ce qui n'a pas été fait par l'intéressée. Le secrétariat général s'est informé auprès du groupe politique en question du bien-fondé des allégations de l'intéressée; il ressort de la réponse du groupe que rien ne corrobore ces allégations. Le Parlement estime que les obligations professionnelles ne sauraient être assimilées à un harcèlement professionnel.
L'intéressée accuse les fonctionnaires de la catégorie A de commettre des abus de pouvoir et des actes discriminatoires et de faire preuve d'incompétence. Ces allégations ne sont pas fondées et mettent en cause les prérogatives de l'autorité investie du pouvoir de nomination ou habilitée à conclure le contrat d'engagement, telles qu'elles sont prévues respectivement aux articles 29, 31 et 34 du statut des fonctionnaires et aux articles 12 et 14 du RAA.
Le Parlement conclut que la décision de licenciement a été prise conformément aux dispositions en vigueur, en ce qu'elle résulte d'une simple diminution de l'organigramme du groupe. Il ajoute que les accusations de harcèlement professionnel sont sans fondement.

Les observations de la plaignante
L'intéressée maintient sa plainte. Elle affirme que, comme le Parlement européen n'a pas motivé la décision de licenciement dont elle a fait l'objet, l'organisme belge compétent (la Caisse auxiliaire de paiement des allocations de chômage - Capac) lui demande avec insistance de remplir un formulaire C4 indiquant pourquoi il a été mis fin à son contrat.
Les observations de la plaignante contiennent, par ailleurs, de nouvelles allégations quant à un congé sans rémunération, à de fausses indications portées sur sa fiche de renseignements, à une carte spéciale belge faisant défaut et à des questions liées à l'École européenne.

LA DÉCISION


Il convient de noter, à titre préalable, que le Médiateur ne s'estime pas fondé à enquêter sur les nouveaux points que la plaignante a soulevés dans ses observations du 30 juin 1999 et dans ses lettres ultérieures, puisqu'ils débordent du cadre de la plainte initiale. La plaignante a pris contact avec le secrétariat du Médiateur au sujet de ses nouvelles allégations le 4 octobre 1999. Il lui a été expliqué à cette occasion que lesdites allégations allaient au-delà de celles formulées dans la plainte initiale, mais qu'il lui était loisible de présenter à leur sujet une nouvelle plainte au Médiateur.
1 Le grief dirigé contre un défaut de motivation
1.1 La plaignante soutient que la décision mettant fin à son contrat d'agent temporaire n'a pas été motivée.
1.2 Le Médiateur relève que, par lettre du 14 octobre 1998, le secrétaire général du Parlement européen a informé la plaignante des motifs sous-jacents à la décision résiliant son contrat. Il ressort de cette lettre que les présidents des groupes politiques avaient adopté, le 17 février 1997, une clé de répartition des postes pour l'organigramme des groupes politiques et que cette répartition avait des conséquences pour le groupe UPE. Le secrétaire général a confirmé, en outre, que, conformément à la clé de répartition retenue, le poste de l'intéressée avait été attribué à un autre groupe politique du Parlement.
1.3 Compte tenu des considérations qui précèdent, il découle de l'enquête du Médiateur que le Parlement a, en fait, motivé sa décision et qu'il a donc pris des mesures pour régler la question et donner satisfaction à la plaignante.
2 Le grief dirigé contre l'établissement tardif, et à l'insu de l'intéressée, du rapport de notation
2.1 La plaignante avance que son rapport de notation a été établi tardivement et sans qu'elle en soit informée.
2.2 Le Parlement admet, dans son avis, que ce rapport de notation, qui couvre la période allant du 1er janvier 1995 au 1er janvier 1997, a été établi avec retard. Il fait valoir qu'une partie de ce retard est imputable au congé de maladie de longue durée de la plaignante, absence ayant fait obstacle à la tenue de l'entretien qui doit avoir lieu préalablement à la rédaction du rapport. En raison de ce congé de maladie, la cessation définitive des fonctions de la plaignante n'a pu intervenir que le 5 juillet 1998.
2.3 La plaignante reconnaît avoir reçu, le 9 juillet 1998, une lettre envoyée par le Parlement le 6 juillet 1998 et contenant son rapport de notation. L'institution y informait la plaignante qu'elle avait un mois pour formuler des observations sur ce rapport. Cependant, la plaignante n'a pas présenté d'observations dans ce délai d'un mois.
2.4 Selon une jurisprudence constante du juge communautaire, le fait de ne pas établir ponctuellement un rapport de notation constitue une faute de service. Le Parlement admet que le rapport de notation a été établi avec retard en l'occurrence, mais il fournit une explication, non contestée par la plaignante, pour une partie de ce retard. Dans ces conditions, le Médiateur n'estime pas qu'il y ait lieu de poursuivre l'enquête. Il ressort des éléments dont il dispose que la plaignante a eu la faculté de formuler des observations sur son rapport de notation, de sorte qu'il n'y a pas eu mauvaise administration quant à cet aspect de l'affaire.
3 Le grief dirigé contre le harcèlement professionnel et l'abus de pouvoir
3.1 La plaignante soutient qu'elle a été victime d'un harcèlement professionnel. Elle affirme que des e-mails échangés avec son supérieur ont été effacés de sa messagerie électronique, bien qu'elle eût utilisé un mot de passe. Elle indique également qu'elle a réclamé une enquête à ce sujet dans un e-mail adressé à l'ensemble de ses collègues le 11 novembre 1997. Le lendemain, il lui était demandé de présenter des excuses pour avoir envoyé ce message, mais elle a refusé d'obtempérer. De surcroît, elle fait état d'abus de pouvoir, y voyant la marque de pratiques discriminatoires et d'incompétence des fonctionnaires du Parlement.
3.2 Dans son avis, le Parlement déclare que le secrétariat général s'est informé auprès du groupe politique en question du bien-fondé des allégations de l'intéressée relatives au harcèlement dont elle aurait été victime et qu'il ressort de la réponse du groupe que rien ne corrobore ces allégations. Ce que la plaignante met en cause, de l'avis du Parlement, c'est l'exercice du pouvoir hiérarchique, qu'elle conteste. Le Parlement considère que les accusations de harcèlement sont sans fondement.
3.3 Le Médiateur estime que, comme la plaignante n'invoque pas une atteinte à sa vie privée, les actes des services du Parlement relèvent en principe de l'exercice du pouvoir hiérarchique et qu'aucun élément n'incite à penser qu'il en va autrement en l'espèce.
3.4 Il résulte de ces constatations qu'il n'y a pas eu mauvaise administration quant à cet aspect de l'affaire.
Conclusion
Son enquête l'amenant à conclure qu'il n'y a pas eu en l'occurrence mauvaise administration de la part du Parlement, le Médiateur classe l'affaire.
La Présidente du Parlement sera informé de la présente décision.
Veuillez agréer, Madame, l'expression de mes sentiments distingués.
Jacob SÖDERMAN